Chaque samedi et dimanche, François Clauss se penche sur une actualité de la semaine écoulée. Aujourd'hui, la qualification de l'OM en finale de l'Europa League.
"Clauss toujours". L'humeur de François Clauss, tous les samedis et dimanches matin à 8h55 sur Europe 1. Bonjour François.
Bonjour Wendy.
Je ne sais pas si vous le ressentez comme moi, en ce printemps enfin émergeant. Qu'il est bon de se laisser bercer par ce doux parfum de "marseillitude" qui souffle sur la France ! Il aura suffi d'un match de foot d'une épique demi-finale d'Europa League pour que toute la France s'embrase dans cette nouvelle épopée : 4,6 millions de téléspectateurs devant W9 pour l'OM, qui fait de TF1 et de son Astérix une petite chaîne de télé ce soir-là. Marseille à la Une de toute la presse régionale, de L'Aber Wrach, en Bretagne, à Saint-Dié dans les Vosges. Même nos confrères du Parisien seront obligés de mettre l'OM à la Une deux jours de suite.
14 ans que les finales de foot européennes sont trustées par les Italiens, les Espagnols, les Anglais et les Allemands. Et voilà Marseille qui répare l'injustice.
Disons-le tout de suite : ce fut un piètre match jeudi soir. Mais tout était là : un but contre son camp, des erreurs d'arbitrage, des stars marseillaises à bout de souffle, une insoutenable prolongation, une inexorable élimination qui se profilait. Et voilà que surgit dans la lumière le remplaçant Rolando, raillé pour ses faiblesses techniques, qui devient le héros d'un soir et que tout Marseille a déjà baptisé "Cristiano Rolando".
La France n'est pas un pays de foot, personne n'a encore compris comment en mai 1976, 150.000 personnes se retrouvaient sur les Champs-Elysées pour célébrer Les Verts de Saint-Etienne, pourtant battus la veille en finale. Personne n'a oublié le million de "blacks-blancs-beurres" sous l'Arc de Triomphe en Juillet-98, dont beaucoup n'ont plus vu le moindre match de foot à la télé depuis. La France n'est pas un pays de foot, mais la France a besoin d'épopée. Et oui, c'est réjouissant que ce soit une nouvelle fois Marseille qui nous la propose, au moment où tout était écrit pour que ce soit l'arrogante capitale et son PSG milliardaire qui l'incarne.
Réjouissant de voir qu'il n'y avait qu'une seule caméra pour le retour de l'enfant prodigue à 220 millions d'euros, Neymar, et que toutes les caméras étaient braquées sur le Vieux-Port. Réjouissant que dans ce foot mondialisé, financiarisé, starisé, il y ait encore une place pour les rebelles du ballon.
Ce n'est pas un hasard si la même année, et Marseille et Liverpool s'invitent en finales européennes et viennent bousculer la hiérarchie des grandes maisons bourgeoises. La capitale du rap et la capitale du rock unis.
Et le message en France, prend bien évidemment une résonance politique qui n'échappera pas au Président Macron, grand supporter de l'OM, mais aussi apôtre de cette politique du ruissellement, cet argent des riches que l'on doit protéger pour en garantir soi-disant la redistribution des dividendes. Le ruissellement du bonheur football n'est pas venu des confortables tribunes VIP du PSG qatari mais bel et bien des turbulents virages marseillais.