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Tous les matins après le journal de 8h30, Emmanuelle Ducros dévoile aux auditeurs son «Voyage en absurdie», du lundi au jeudi.

Le week-end prochain, à Doha, au Qatar, aura lieu une réunion sur l’Afghanistan, organisée par l’ONU. En présence des Talibans, mais sans la société civile, ni les femmes.

Il s’agit de discuter de la réintégration de l’Afghanistan dans la communauté internationale, dont le pays est exclu depuis 2021 et la reprise du pays par les Talibans. C’est la troisième réunion de ce type organisée par l'ONU à Doha, mais la première à laquelle participeront les Talibans. L’envoyée de l’ONU en Afghanistan, la khirghize Roza Otunbayeva a bien expliqué à la presse qu’il était impossible d’inclure les femmes afghanes à cette réunion si on voulait qu’ils viennent. Mais elle a insisté : « personne n'a dicté »  sa conduite à l’ONU dans cette affaire. Explication révoltante. L’Onu avait fait mine de résister aux injonctions Talibans lors des deux premières réunions. Elle s’est couchée devant les barbus en turban pour la troisième. Ils n’ont même pas eu à insister.

Les associations de défense des droits de l’Homme sont furieuses.

A raison. Ce qui ressort de ce lamentable épisode, c’est que les femmes ne comptent pour rien. Roza Otunbayeva indique que la réunion se concentrera sur ce qu’elle considère comme « les problèmes aigus les plus importants d’aujourd’hui » – les affaires et les banques privées, lutte contre les stupéfiants. Les droits des femmes ne seront pas à l’ordre du jour. Effacés, exactement comme les Talibans les effacent, avec la bénédiction de l’ONU.

Une insulte pour les 28 millions d’Afghanes qui vivent comme des mortes vivantes dans un pays ou les islamistes au pouvoir ont interdit l’éducation des filles de plus de 11 ans, ont chassé les femmes des espaces publics, des emplois, leur imposent, sous peine de mort, la tutelle masculine et un code vestimentaire qui relève du cercueil de tissu.

L'ONU n’essaie même plus de sauver les apparences.

Non. Ce n’est qu’un épisode de plus dans une dérive qui sacrifie les droits des femmes, sur l’autel d’on ne sait trop quoi. En mars, l’ONU avait désigné l’Arabie saoudite pour prendre la tête d'une commission censée œuvrer pour l’égalité des sexes et pour l’autonomisation sociale, politique et économique des femmes. Sans doute l’un des pires pays de la planète où être une femme. Personne, pas même les pays européens n’a bronché. L’habitude, sans doute. Il y a trois ans, c’était l’Iran qui dirigeait la Commission.

Ça commence à faire beaucoup.

Oui, hélas. On l’a vu avec la difficulté qu’a eue le secrétaire général Guterres à condamner le pogrom du Hamas en Israël, le 7 octobre dernier. Viols, tortures, enlèvement de femmes. Tout cela « n’est pas arrivé dans le vide » selon lui. On l’a vu aussi quand les membres du Conseil de sécurité de l’ONU ont observé, en mai une minute de silence en hommage au président iranien, dit le « boucher de Téhéran », organisateur de la grande répression des femmes de son pays.
Les droits humains sont devenus pour l’ONU des détails avec lesquels on peut transiger. Des amusettes. Les femmes, les petites filles, en sont les premières victimes, dans l’indifférence générale des bonnes consciences occidentales si vocales contre les fascismes et qui couvrent là leur indignation d’un voile pudique. Et c’est une honte.