Tous les matins après le journal de 8h30, Emmanuelle Ducros dévoile aux auditeurs son «Voyage en absurdie», du lundi au jeudi.
Un appartement squatté est-il un logement vacant ? C’est la question insoluble qui est posée par le fisc à un retraité Marseillais.
Histoire qui se mord la queue relatée il y a quelques jours sur le site Internet du Figaro. Celle d’un homme de 71 ans, ancien patron de bar, de la région de Marseille, et qui a eu la mauvaise surprise de recevoir du fisc un avis de taxe sur les logements vacants. On lui réclame 1000 euros , il devait les payer avant le 15 décembre, parce qu’il possède quatre logements à Marseille et que ceux-ci n’avaient pas de locataires au 1er janvier.
Il est frappé par une taxe qui a été créée en 1999, applicable dans les communes où existe un déséquilibre marqué entre l'offre et la demande de logements, ce qui entraîne des difficultés d’accès pour les locataires.
Et ce retraité refuse de payer la taxe.
Oui, parce qu’au premier janvier dernier, les logements qu’il possède à Marseille n’étaient pas vacants : ils étaient squattés. Il n’a donc évidemment pas pu déclarer de loyers. Pour le fisc, s’il n’y a pas de loyer, c’est que les logements sont vides et donc, la taxe est due.
René ne décolère pas.
Pour lui, ce n’est plus la goutte d’eau qui fait déborder le vase, mais tout un orage. Ca fait deux ans et demi, raconte-t-il que cette histoire d’appartements lui pourrit la vie. Il a eu des locataires mauvais payeurs, qui sont partis, aussitôt remplacés par des squatteurs. Des mois sans loyer et des logements saccagés par-dessus le marché.
«Nous avons tout tenté: la police, les maires, le préfet, les huissiers, nous avons envoyé une soixantaine de recommandés, sans réponse, l’expulsion n’a jamais été ordonnée», explique René qui continue à payer les factures d’eau, les taxes foncières et les frais de justice pour ne pas se mettre dans l’illégalité. Il en est à 25.000 euros de pertes.
Comme il n’arrivait pas à se débarrasser des squatteurs, et que la plaisanterie lui coûtait très cher, il a dû brader ses biens, 200.000 euros pour les quatre appartements.
Résumons : Un homme qui n’a pas pu obtenir de la justice et de l’Etat qu’ils fassent respecter son droit de propriété est, en plus, sanctionné par l’État pour n’avoir pas pu louer ses biens, à cause des squatteurs et de l’Etat.
Il va finir par payer ? Il peut faire un recours ?
Oui, et en théorie, il le gagnera, mais ce sera une victoire bien coûteuse. La taxe sur les logements vacants n’est pas due par les propriétaires des logements occupés illégalement. Mais il faut prouver à l’administration fiscale que le bien est squatté. René pensait sans doute de bonne foi que toutes les démarches entreprises en justice suffisaient à l’État. Mais les services ne communiquent pas entre eux.
Il y a pire : selon une experte en droit fiscal interrogée par le Figaro. Pour prouver le squat, Il faut fournir un PV de police, un acte indiquant une procédure d’expulsion, ce que René n’a jamais obtenu. Ou alors un acte d’huissier. Et cet acte d’huissier, qui sert à prouver à l’Etat ce qu’il sait déjà et qu’il n’a pas fait son job, coûte 300 euros pour un appartement., soit à peu près le coût de la taxe sur le logement vacant. C’est Pile l’Etat gagne, Face René perd.