Chaque matin, Marion Sauveur nous parle d'alimentation, de "mieux manger", de solutions concrètes pour changer ce qu'il y a dans notre assiette.
Nous sommes le 8 mars, Journée internationale des droits des femmes. Marion Sauveur s’intéresse à celles qui nous font rêver avec leurs assiettes : les femmes cheffes françaises.
S’il y a bien un milieu qui reste très masculin, c’est celui de la gastronomie. Seulement 25% des cuisiniers professionnels sont des femmes. Elles ne sont que 10% à exercer dans les restaurants gastronomiques et 6% sont cheffes.
Parmi ces cheffes, il y en a que vous connaissez peut-être : Anne-Sophie Pic (la seule femme 3 étoiles en France), Hélène Darroze (que vous avez vu sur M6 dans Top Chef) ou encore l’ancienne candidate de Top Chef, Fanny Rey.
Comment on explique qu’il y ait si peu de femmes cheffes ?
La cuisine a toujours été associée aux femmes mais la gastronomie aux hommes que ce soit sous Taillevent, le premier chef français qui officie à la cour ou au XIXe siècle, lorsque les restaurants se développent. Les femmes sont cantonnées au foyer, à cuisiner des plats mijotés alors que les hommes sont, eux, aux fourneaux et réalisent une cuisine plus élaborée.
À l’époque, les femmes n’ont droit qu’à une éducation religieuse et domestique. Jusqu’en 1893, le Congrès de la chambre syndicale ouvrière est opposé à l’admission des femmes comme apprenties dans les grandes cuisines. L’association des maîtres cuisiniers de France autorise l’accès aux femmes depuis seulement 10 ans. Côté formation, elles n’auront pas accès au CAP cuisine avant les années 1980, près de 70 ans après sa mise en place.
Avant les années 1980, quelques femmes se sont tout de même illustrées ?
Des Lyonnaises. L’une des plus célèbres est la Mère Brazier. Dans son bouchon, où elle sert des plats lyonnais : le saucisson chaud brioché, les quenelles de brochet ou encore sa poularde demi-deuil (farcie sous la peau avec des lamelles de truffe).
En 1933, le Guide Michelin attribue pour la première fois des étoiles aux établissements incontournables. La Mère Brazier et la Mère Bourgeois obtiennent tout de suite 3 étoiles, le graal ! Il faut attendre 18 ans pour qu’une femme soit de nouveau consacrée (Marguerite Bise, près d’Annecy). Et plus rien avant 2008, 57 ans plus tard !
Les mentalités ont tout de même évoluées, non ?
Oui d’ailleurs dans les grandes écoles de cuisine, les femmes sont majoritaires depuis cinq ans (55% femmes contre 45% hommes). L’environnement devient moins machiste mais toujours très exigeant. Et l’écart salarial entre hommes et femmes reste de 28 %.
Elles sont nombreuses à être étoilées ?
Sur les 621 établissements étoilés cette année, 17 sont dirigés par des femmes dont deux pour Anne-Sophie Pic. Et sur les 57 nouvelles tables primées (2 trois-étoiles, cinq nouveaux deux-étoiles et 50 une étoile) seules deux femmes ont décroché l’étoile et encore, elles travaillent en duo avec leur mari.
On voit peu de femmes dans les Concours, qui sont pourtant de véritables tremplins pour la carrière. Seules deux sont aujourd’hui Meilleure ouvrier de France (Virginie Basselot en 2015 et Andrée Rosier en 2007).
Vous l’avez compris les femmes cheffes sont encore trop peu nombreuses à émerger. Vérane Frédiani leur rend hommage dans son documentaire “A la recherche des femmes chefs” qui vient de sortir en DVD (14,99 euros).