Suite au changement climatique, les arbres qui abritent les truffes ne permettent plus leur développement optimal.
Tuber, Quercus et Chiroptera
La truffe, ce délectable champignon qui vaut son pesant d’or (plus de 1.000 euros le kilo) a toujours été à l’origine de nombreuses spéculations quant à son développement. Peter Mayle, écrivain, a même qualifié le monde de la truffe de "plus secret que l’organisation des Renseignements généraux".
La truffe est pourtant consommée depuis le début du 16e siècle, lorsque François 1er l’a introduite à la cour, permettant ainsi de démystifier son image. En effet, ce champignon, qui naît sous terre à la suite des orages, a été interdit à la consommation pendant plusieurs siècles, car associé à l’œuvre du diable. Il faudra cependant attendre le début du 21e siècle pour commencer à percer l’immense mystère autour de ce champignon.
C’est François le Tacon et son équipe de l’INRA qui vont comprendre pour la première fois le la relation symbiotique fondamentale qui unit les truffes à leur arbre hôte (principalement des chênes, hêtres, noisetiers ou tilleuls). Une idée surprenante leur vient à l’esprit : puisque les arbres utilisent du dioxyde de carbone (CO2) lors de la photosynthèse, il suffit de marquer ce gaz grâce à un isotope (du carbone 13) et étudier sa progression dans la biosphère. À la stupeur générale, du CO2 marqué a été découvert dans les truffes voisines. Il ne restait donc plus qu’à découvrir ce lien invisible qui connecte ces rares champignons à leur arbre-mère.
La chance a frappé dans l’Oise, lorsqu’un spéléologue, en mission sur le terrain pour étudier les chauve-souris, à découvert d’étranges boules noires qui tapissaient le sol de la galerie dans laquelle il progressait. Étonné par cette découverte, il rapporta à la surface des échantillons de sa trouvaille, qu’il présenta à des mycologues. Leur résultat fut sans appel : il s’agissait de truffes de Bourgogne en formation !
C’est grâce à cette découverte inattendue que François le Tacon a eu pour la première fois la possibilité d’étudier la formation de ces champignons et mettre le doigt sur le cordon ombilical des truffes ; car il s’agit bien d’un filament invisible à l’œil nu qui joue le rôle d’intermédiaire avec l’arbre et qui fournit les nutriments nécessaires à la croissance des embryons de truffes.
Plus troublant encore, les truffes sont sexuées, cela signifie qu’il existe des champignons mâles et des champignons femelles. Au pied d’un arbre, ce sont généralement des truffes du même sexe qui naissent, et leurs filaments doivent entrer en contact avec ceux d’une truffe appartenant à l’autre sexe pour donner naissance à des petites truffettes, un peu comme chez les êtres humains !
Malheureusement, ce surprenant champignon si prisé devient de plus en plus rare. À l’aube du 19e siècle, la France produisait 700 tonnes de truffes par an, alors qu’aujourd’hui, les producteurs truffiers dépassent rarement les 50 tonnes. La faute au changement climatique, entre autres, qui augmente la fréquence des épisodes de chaleur intense et la sécheresse des sols ; un exemple qui illustre à quel point tout est lié dans la Nature.
Dans un avenir chamboulé par le changement climatique, il nous faut manœuvrer avec une vision d’ensemble pour espérer préserver les détails qui s’avèrent être essentiels au fonctionnement du monde.