Mutuellement utiles, Macron et Mélenchon ne peuvent plus se passer l’un de l’autre

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À 17.000 kilomètres de distance, Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon se sont vivement interpellés, s’accusant mutuellement "de remettre en cause la démocratie", après les violences qui ont émaillé le défilé du 1er mai.

La distance n’est rien pour ceux qui s’aiment. Rien non plus, visiblement, pour ceux qui se choisissent comme adversaires exclusifs. "C'est la faute de ceux qui tiennent un discours d’agitation", les "pyromanes indignés", a fustigé le président depuis l'Australie. "Je pense qu’il y a beaucoup de gens qui veulent rejouer la partie démocratique, ils n’ont jamais accepté la défaite, ils aiment la démocratie quand ils gagnent", a-t-il ajouté, incisif. Ces accusations ont sifflé aux oreilles de Jean-Luc Mélenchon, qui goûte peu le rappel de son échec à 600.000 voix près. Retour à l’envoyeur immédiat : "Ce sont des attaques indignes et mensongères. Ce que Macron ne supporte pas, c’est l’opposition."

Mélenchon se défend d'attiser les braises. Ce qui se joue derrière cette joute, c'est de savoir à qui incombe la responsabilité de la violence. Le président accuse le leader de La France insoumise d’être l’inspirateur des actes commis par les "Black blocs". "Les individus qui cassent une vitrine de MacDo ne font pas oeuvre d’activité révolutionnaire, ils ne sont donc ni mes amis ni mes alliés", se défend Jean-Luc Mélenchon. Mais son discours libérerait-il les pulsions destructrices de certains ? Toujours non, répond l'intéressé. "La violence verbale est symbolique", expliquait-il jeudi, "elle remplace ce qu’on réglait hier à coups de revolver". Mieux, "c’est une manière de maintenir l’ordre".

Une ambivalence du discours. Un peu court. En effet, s’agissant du respect de l’ordre démocratique, Jean-Luc Mélenchon flirte souvent avec la ligne rouge. À l’automne dernier, certains de ses amis s’étaient laissés aller à lancer "qu’ils étaient prêts à renverser Macron". Le numéro 1 de la France Insoumise avait fini par concéder, que là encore, on avait mal compris. "Moi, je crois aux élections", avait-il nuancé. Ouf, le dégagisme par les urnes, pas par la rue. Sauf qu’il est curieux de défendre le pouvoir du verbe, virulent pour bousculer, et de s’en dédouaner quand il produit de la violence.

 

 

Fracture et service. Le mot d'ordre "Faire la fête à Macron", samedi dans la rue, joue sur cette ambivalence sémantique et politique. Faire sa fête à quelqu'un, c'est le frapper, voire… pire. Jean-Luc Mélenchon renvoie la responsabilité de la violence au président, à sa gouvernance et sa politique. Un vieux débat nourri par l’extrême-gauche, qui cherche à mettre sur un pied d’égalité la responsabilité personnelle des individus qui perpétuent des actes violents, et la responsabilité collective d’un système qui génère de la violence sociale. Une fracture irréductible entre deux systèmes de pensée, deux adversaires, qui chacun tire avantage à se choisir comme interlocuteur exclusif. Emmanuel Macron évacue tous ses opposants "raisonnables", Jean-Luc Mélenchon se voit décerner le brevet "d’opposant unique". Ils sont d’une certaine façon "l’idiot utile" l’un de l’autre.

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