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Tous les jours dans la matinale d’Europe 1, Olivier de Lagarde scrute et analyse la presse du jour. Aujourd’hui, la conférence de presse d'Emmanuel Macron qui n'a pas convaincu et le Rassemblement national qui n'a jamais été aussi près de la victoire.

Convaincre.

Et on ne peut pas dire que les l’exercice de conviction fut particulièrement réussi hier pour Emmanuel Macron. J’en prend pour preuve la lecture de la presse régionale souvent moins partisane que la presse Parisienne.

Macron à nouveau sur l’air du « moi ou le chaos », résume la Provence dans les colonnes de laquelle François Tonneau n’a rien trouvé de très nouveau à cette dramatisation. « Sauf que plus les années avancent, plus le chef de l’Etat diminue de sa superbe » écrit-il.

A Strasbourg, les explications d’Emmanuel Macron n’ont pas convaincu non plus Pascal Coquis, l’éditorialiste des Dernières Nouvelles d’Alsace : « On ne joue jamais impunément avec des allumettes près d’un bidon d’essence -rappel-t- il-, Car ce qu’omet sciemment de dire le chef de l’Etat, tout à sa volonté d’incarner encore et encore jusqu’à l’absurde la figure du sauveur d’un danger qu’il a lui-même précipité, c’est qu’une cohabitation n’a jamais empêché un gouvernement de gouverner. Si le RN obtient une majorité parlementaire comme il est réaliste de l’envisager, poursuit-il, le président n’aura pendant un an au moins aucun moyen de freiner son action ».

Des duels RN contre gauche.

Parce que cette hypothèse d’une victoire du RN devient de plus en plus crédible. Le Figaro fait parler les chiffres ce matin.

Le journal a décortiqué les résultats des Européennes, circonscription par circonscription et le constat est sans appel.

Bien sûr, les Européennes ne sont pas les législatives, mais tout de même, si les français votaient exactement de la même façon à un mois d’intervalle, le Parti de Jordan Bardella arriverait en tête dans 457 circonscriptions sur 577.

Mais, le plus spectaculaire peut être, c’est que dans 536 de ces circonscriptions, il n’y aurait ni triangulaire ni quadrangulaire. Dans 536 cas sur 577 un duel opposerait au 2eme tour le Rassemblement national au Front de gauche. En clair, ces législatives pourrait aboutir à la quasi-disparition des LR et des marconistes à l’Assemblée nationale... Les Républicains qui, soit dit en passant, n’ont même pas attendu le scrutin pour décider de se suicider.

La question sera ensuite de savoir qui les électeurs de ces deux camps préfèreront envoyer à Matignon entre Jordan Bardella et Jean Luc Mélenchon.

En tous cas selon un sondage Ifop, Fiducial pour Paris Match, 60% des Français s’attendent désormais à une victoire du RN... Ils ne sont que 15% à penser possible une victoire de la gauche.

« Si on arrive au pouvoir, ce ne sera pas Noël ».

D’ailleurs le Rassemblement national est en train de se préparer à gouverner. Témoin ce papier très intéressant dans l’opinion. Nina Jakowski et Marc Vignaud ont rencontré Jean Philippe Tanguy. C’est lui qui serait, selon toutes vraisemblances, nommé à Bercy en cas de victoire du RN.

Parmi les premières mesures qu’il prendrait, la baisse de la fiscalité sur les carburants et l’électricité, annulation de la hausse du prix gaz. Mais surtout il commanderait un audit sur les finances publiques, parce que la situation risquerait de se tendre extrêmement rapidement pour la France sur les marchés financiers...

Ce que je peux confirmer dit il c’est qu’on ne laissera pas filer les déficits, dit il. Si on arrive au pouvoir, ce ne sera pas Noël.

Macron, démission ?

Mais la France ne file pas forcément vers une nouvelle cohabitation.

Il n’est pas sûr qu’Emmanuel Macron en cas de victoire du RN reste longtemps à l’Elysée.

Certes, le président de la République a démenti hier avec force lors de sa conférence de presse toute envie de quitter l’Elysée. Mais Le Point a recueilli les confidences de quelqu’un qui le connait quand même très bien : Sa femme.

« Brigitte Macron, et elle n’est pas la seule, écrit Mathilde Siraud, est convaincu que son mari préfèrerait quitter la scène qu’avoir à subir l’humiliation d’un partage du pouvoir avec le RN. Elle s’en est déjà ouverte auprès de visiteurs. La perspective d’une démission du président, impensable jusqu’ alors ne parait plus totalement farfelue écrit-elle.

Lebrun ou Deschanel ?

Et dans le même numéro du Point, Alain Minc confirme.

Ce conseiller de l’ombre qui connait bien Macron et le fonctionnement des institutions explique : « De toutes façons le RN aura le pouvoir de le faire tomber. Les moyens matériels sont chez le Premier ministre et l’Elysée ne vit que des crédits donnés par Matignon. Il y a de plus, chez Emmanuel Macron, un orgueil démesuré dont on a vu dimanche soir les conséquences qui fait qu’il n’acceptera jamais de devenir Albert Lebrun ! »

Oui, le brave Albert.

Alors comme nous sommes en plein révision du Bac, permettez-moi de faire un peu le cuistre de vous de rappeler qu’Albert Lebrun fut le dernier président de la 3eme République, celui qui abandonna le pouvoir au Maréchal Pétain mais sans démissionner toutefois.

Du coup, Alain Minc aurait pu s’amuser à le comparer à un autre président : Paul Deschanel, qui un beau jour, comme Emmanuel Macron, n’a pas bien compris ce qui lui arrivait. C’était le 23 mai 1920, on retrouva le Président de la République hébété en pleine nuit en pyjama... Mais lui n’était pas victime d’une sortie de route politique, il venait juste par mégarde de tomber d’un train.