Marine Le Pen est étrangement réservée après la série d'attentats, de quoi soulever des interrogations sur la stratégie de son parti.
David Doukhan, expert politique
La stratégie du FN après les attentats
Marine Le Pen sera donc ce soir l’invitée du 20h de France 2. La Présidente du FN répètera ses propositions en matière de lutte anti-terroriste. Elle développera sa position dans la polémique qui fait rage entre la droite et le gouvernement au sujet de l’État de droit. Je vais vous lire une phrase tirée du communiqué de Marine Le Pen après l’assassinat du prêtre Jacques Hamel : "Il faut rappeler que la réponse est politique et que la préservation de l’État de droit, indispensable, et sur laquelle nous ne transigerons pas, passe d’abord par l’application des lois et des peines." Alors que les Français sont en colère, apeurés, prêts à en découdre pour certains, Marine Le Pen ne surfe pas sur les peurs et se pose en garante de l’État de droit. Avouez que vous ne vous y attendiez pas !
Pourtant ce n’est absolument pas surprenant. D’abord dans le contexte terroriste, les stratèges du FN constatent qu’une partie de la population se tourne naturellement vers eux. Le FN est perçu comme un parti de l’autorité. Donc nul besoin pour Marine Le Pen de donner des coups de mentons, ou de crier plus fort que les autres. En revanche, et ça tous les sondages qualitatifs le montrent, les Français sont toujours inquiets quant à sa capacité à mettre en pratique les mesures, sa crédibilité face au pouvoir, si vous voulez. Marine Le Pen a accueilli comme du pain béni le spectacle de surenchère donné par la droite pour cette raison. Cette surenchère commencée par les "lance-roquettes" d’Henri Guaino et qui se termine par les appels à enfermer les suspects "a priori", ce qui équivaut de fait à l’abandon de l’État de droit.
Pourquoi du pain béni ?
Parce qu’elle a trouvé un discours plus radical que le sien. Elle fait le calcul qu’il lui bénéficiera de toute façon selon le vieux précepte : "les Français préfèreront l’original a la copie". D’une pierre deux coups, elle s’achète, à peu de frais, une respectabilité. Marine Le Pen a un point faible : s'intéresser encore trop à convaincre de potentiels électeurs, notamment chez les personnes âgées, qui jugent qu’elle représente une trop grande incertitude pour l’avenir. En disant : "avec moi les libertés individuelles seront garanties" ou "l’État de droit sera protégé", elle s’attache à contrer cette image. Marine Le Pen ce soir au 20h de France 2, soit une attente de quatre jours pour s’exprimer dans les médias après l’assassinat du prêtre Jaques Hamel. Sans précipitation. La campagne présidentielle, on le sait, se fera sur la menace terroriste. La candidate du Front aborde l’échéance sereinement.
Ses adversaires, à Gauche comme à Droite, ne donnent pas ce sentiment. La question est : s’en rendent-ils compte ?
Emmanuel Duteil, expert Economie
La construction de deux EPR en Grande-Bretagne par EDF.
Le projet Hinkley Point va finalement se réaliser. Ce fut un accouchement dans la douleur. Hier le conseil d'administration d'EDF a été tendu. Un administrateur contre le projet a démissionné juste avant. Au final le "oui" l'a emporté de justesse : 10 voix contre 7. Ce n'est vraiment pas un "oui" massif. Il est rare qu'au sein d'un conseil d'administration un projet aussi important pour une entreprise soit si peu soutenu. Il faut dire que les syndicats d'EDF représentés au conseil sont tous opposés à ce projet. Pour eux il va mettre en danger l'entreprise. Vous vous en souvenez peut-être, l'ancien directeur financier a claqué également la porte il y a quelques mois. Il estimait lui aussi que ce dossier est trop dangereux.
Pourquoi la direction d'EDF tient autant à ce projet ?
Pour la direction c'est l'avenir des centrales nucléaires qui est en jeu, et donc l'avenir d'EDF. Si ce projet ne se fait pas EDF et Areva vont perdre des compétences, ils ne seront plus au niveau, dit-on dans l'entourage de la direction de l'électricien. Donc à EDF on est persuadé il faut absolument y aller, tout de suite. Si on attend deux ou trois ans comme le demande les syndicats, ça remet tout en cause et là on ne saurait pas gérer, dit-on chez EDF. La direction estime par ailleurs que le Brexit ne change rien. "Nous sommes une entreprise locale en Grande Bretagne" ; "pas d'impact pour nous" dit la direction.
Mais la nouvelle doit tout de même compliquer la vie d'EDF, puisque la compagnie veut maintenant signer le plus rapidement possible ce contrat avec le gouvernement britannique. Hier à Londres on voulait se donner du temps par contre.
Ce "oui" du conseil d'administration n'enlève pas tous les doutes autour de ce projet ?
Aujourd'hui aucun EPR ne fonctionne, quel que soit son pays d'accueil. Le projet finlandais est un fiasco industriel. Les problèmes s'accumulent à Flamanville en France. Il y a bien que la construction de ceux de Taichan en Chine qui semble se passer à peu près normalement. Donc le projet britannique est très risqué d'un point de vue industriel. Personne ne sait vraiment si on saura faire. C'est aussi et surtout un gros risque financier. On parle d'un projet à plus de 20 milliards d'euros dont les 2/3 seront à la charge de l'électricien française le reste ce sera pour un partenaire chinois. C'est un gros pari pour un groupe comme EDF qui est déjà très endetté. Ce projet dépasse tout. Si ça marche ça fera d'EDF un géant du nucléaire. On le sait même si l'énergie renouvelable va se développer le nucléaire n'est pas mort, loin de là. Donc oui, ce projet "Hinkley point" pourrait être un pari gagnant sur l'avenir, mais un pari risqué.
Jeanne Daudet, experte Actualité régionale
Le notaire qui se croyait dans Prison Break
En prison dans le Rhône, une détenue a reçue visite pour le moins cocasse. Sandrine est détenue depuis le mois de février à la prison de Corbas. En juin dernier, elle est appelée au parloir. Son visiteur ? Un huissier de justice. Il est venu lui remettre une assignation en résiliation de location. Car Sandrine, depuis qu'elle est détenue, a 1.300 euros d'arriérés de loyer pour son appartement qu'elle loue dans un village du Beaujolais. Ses propriétaires, un couple de retraité, souhaitent donc l'expulser du logement pour le relouer. Problème assez comique, l'adresse pour l'expulsion sur l'acte notarié est le "40, boulevard des nations, Corbas", soit l'adresse de la prison ! L'huissier veut expulser la condamnée de sa cellule !
Boulette. Je vous laisse imaginer l'hilarité générale notamment des avocats de Sandrine. Surtout à la lecture de l'acte "Les requérants pourront procéder à l'expulsion en faisant, s'il a lieu, procéder à l'ouverture des portes, éventuellement avec l'assistance de la force publique". Cas de "nullité flagrante" précise le Progrès. Nullité, on précise, est le terme juridique. L'huissier peut rédiger une nouvelle assignation mais obligatoirement quinze jours maximum avant la date d'audience fixée au 23 août. Cela va peut-être s'arranger pour Sandrine. Ses avocats vont tenter d'obtenir la clémence du tribunal. Sandrine disposerait des 1300 euros réclamés et bénéficiera peut-être dans la foulée d'un aménagement de peine, soit lui permettre de sortir de prison d'ici quelques mois au lieu de mai 2017 comme ce qui a été initialement prévu.