Plutôt que de laisser le discours religieux lentement se radicaliser, l’État pourrait financer les cultes sur tout le territoire, donc les contrôler.
David Doukhan, expert Politique
L'organisation du culte musulman : l'idée d'un concordat avec l’État.
Bernard Cazeneuve a mis le sujet sur la table samedi dernier lors d’un séminaire gouvernemental à l’Élysée. Le ministre part du constat suivant : dans le cadre de la loi de 1905, c’est très difficile pour la puissance publique d’offrir un cadre à la pratique de la religion musulmane. Concrètement les lieux de culte bâtis en France avant 1905 sont pour bon nombre la propriété des communes qui en assurent donc la rénovation et participent, pour simplifier, financièrement à l’organisation du culte. Cette application de la laïcité se justifie dans le sens où la puissance publique est le garant de sa bonne pratique. Aujourd’hui l’Islam est devenu la deuxième religion de France alors qu'en 1905 elle n’était même pas sur la photo.
Or, la construction des mosquées et leur entretien dépendent donc bien souvent de financements étrangers. Exceptions faites en Alsace ou en Moselle où le concordat permet à la puissance publique de participer bien plus aisément au financement des mosquées. Le ministre de l’Intérieur est pour le moins interpelé par cette disparité : si on finance, on contrôle. Même chose pour la formation des Imams. L’État ou les collectivités locales auraient une relation bien plus étroite avec le culte musulman et donc plus de facilité à endiguer les phénomènes de radicalisations.
L’idée semble séduisante ! Pourquoi n’est-elle pas portée publiquement haut et fort ?
Parce que si vous résumez cette idée, si vous la caricaturez, ça donne : "ils ont fait des attentats et donc maintenant on va leur donner de l’argent". Voilà à quoi vous vous exposez si vous mettez maintenant ce débat sur la place publique. Cette idée du concordat pourrait être une solution performante pour rassembler, pour apaiser, pour réconcilier, mais c’est absolument impossible de l’évoquer aujourd’hui. D’ailleurs à l’Élysée, on dit que la réflexion du ministre de l’Intérieur est la bienvenue, comme tout ce qui peut aider à la concorde. Mais pour autant cette idée ne fait pas partie des priorités du Président.
Autre problème, l'organisation hiérarchique de l'Islam n'existe pas. Le CFCM créé en 2003 par Nicolas Sarkozy est l’interlocuteur officiel de l’État. Sauf que cette institution est contestée au sein même de la communauté des musulmans en France. Tant que ce sera le cas, il sera impossible de réorganiser la relation entre la République et l’Islam. C’est pourtant un enjeu majeur.
Probablement que l’on paie aujourd’hui le manque de réflexion sur le sujet depuis trente ans.
Emmanuel Duteil, expert Économie
Salaire de Carlos Ghosn : Renault est-il un pompier pyromane ?
Retour en arrière : fin avril, coup de tonnerre, l'assemblée générale des actionnaires de Renault dit non à la rémunération de Carlos Ghosn : 7 millions d'euros auxquels il faut ajouter près de 9 millions chez Nissan. Même si ce vote n'est que consultatif c'est la première fois que des actionnaires votent contre la rémunération d'un tel patron. L’État qui est actionnaire à près de 20% de Renault était le plus remonté. C'est vraiment lui qui a fait pencher la balance.
Donc à cette époque, Carlos Ghosn va-t-il voir son salaire réduit ?
Certes, mais le geste est limité. Aujourd'hui le salaire de Carlos Ghosn est composé d'un salaire fixe (1,2 million par an), un montant stable depuis 2011. Il faut y ajouter une part variable qui dépend des résultats de Renault, une part qui peut monter jusqu'à 150% de ce salaire fixe. Je ne vais pas vous demander de faire le calcul de tête vous ajoutez au maximum un peu plus d'1,8 million. Enfin, Carlos Ghosn touche ce que l'on appelle des actions de performances. Ce sont des actions Renault qui dépendent là aussi de la réussite de l'entreprise, bien que ce ne soit pas de l'argent encaissé immédiatement.
Si on cumule tous ces bonus on arrive donc à 7 millions.
Carlos Ghosn a donc consenti à ce que son salaire variable ne puisse plus dépasser 120% du fixe. Les règles pour le toucher seront plus claires et transparentes. Si ces règles avaient été appliquées dès cette année, son salaire de 7 millions aurait été diminué de 450 000 euros.
Est-ce vraiment assez pour calmer les esprits ?
Peu de chance. Du coté de l’État on trouve que c'est un geste totalement insuffisant. Mais ils n'ont pas vraiment de pouvoir pour le pousser à aller plus loin. Du coté de Renault on estime qu'il y a un marché mondial des patrons et que Carlos Ghosn serait l'un des "meilleurs", donc en conséquence de quoi n'est pas le mieux payé parmi cette élite. On est par exemple très loin du salaire du patron de Ford. Dès ce matin Renault compte bien prouver que Carlos Ghosn mérite son salaire. Comme PSA hier, le constructeur devrait annoncer des résultats semestriels assez exceptionnels.
Jeanne Daudet, experte Actualité régionale
Le sens giratoire de Nevers donne le tournis.
Le centre de Nevers ces jours-ci cela ressemble à un célèbre sketch de Devos. Vous savez celui où il est dans "sa voituuuuure, il prends l'sens giratoiiiiire" et là c'est le drame.
Ce sketch ne prend pas une ride. Il a visiblement inspiré quelques nivernais. Depuis quelques semaines, les panneaux de signalisation changent de place, de quoi donner quelques situations cocasses. Au même carrefour, vous voilà désormais avec un panneau "obligation de tourner à droite" et en dessous "obligation de tourner à gauche". Quelques jours avant, il y avait deux panneaux qui interdisaient de tourner à gauche et à droite. Vous voilà obligé d'aller tout droit, en plein dans le parc. Dernier exemple : des flèches qui ont été changé de place sur le rond point. Je vous laisse imaginer ce que ça peut donner.
On s'en amuse mais ça n'a pas été le cas de la municipalité.
La mairie n'apprécie pas franchement le comique de répétition. Pour l'adjointe au maire chargée de la mobilité urbaine c'est même dangereux. Il faut aussi penser que cela coûte cher à la commune. "Chaque lundi matin", explique-t-elle, "les agents municipaux font le tour de la ville pour vérifier que tout est en place." Deux à trois fois par semaine ils doivent repositionner des panneaux et ne travaillent donc pas sur autre chose. Le coût des dégradations dans la commune est estimé entre 30 000 et 50 000 euros par an. A ce niveau la commune a perdu son sens de l'humour et porté plainte.