Chaque jour, la matinale d'Europe 1 revient sur l'un des événements sportifs qui fait l'actualité. Ce mardi, Virginie Phulpin revient sur l'organisation du Dakar en Arabie Saoudite. Selon elle, il ne faut pas que quelques pays autocratiques confisquent les grands événements sportifs mondiaux.
Sébastien Loeb a abandonné hier sur le Dakar. Le rallye a lieu en Arabie Saoudite. Est-ce que le sport peut et doit se dérouler dans un pays aussi peu regardant sur les droits humains ? Pour Virginie Phulpin, le problème, c’est que ce sont ces pays riches et autocratiques qui risquent de devenir les seuls à organiser des événements sportifs.
En 2020, on a vu les sportives et les sportifs se reconnecter aux questions politiques et citoyennes, aux questions des droits humains. On en a beaucoup parlé, il y a eu un vrai changement au cours des derniers mois. Et puis là, on retrouve le rallye Dakar qui nous invite au voyage à travers des paysages de carte postale dans un pays autocratique. Il y a quelque chose qui ne va pas.
ASO, l’organisateur du Dakar, se justifie. D’abord il y a beaucoup d’autres événements sportifs qui ont lieu en Arabie Saoudite. Et puis en allant dans ce pays, on participe au changement, à l’ouverture. Alors, que d’autres le fassent, c’est tout sauf une justification. Oui, il y a eu de la boxe, du tennis, du foot dans ce pays, mais on n’est pas obligé de suivre à chaque fois. Ensuite participer au changement, vraiment ? Pourquoi pas, il fallait essayer l’an dernier, ça aurait pu marcher, on aurait pu voir des signes d’ouverture du régime saoudien et Virginie Phulpin aurait applaudi des deux mains. Mais c’est faux.
L’Arabie Saoudite a condamné la militante des droits humains Loujain Al Hathloub à plus de cinq ans de prison le 28 décembre. C’est à dire quelques jours avant le départ du Dakar. On a du mal à voir les signes d’ouverture, là.
Est-ce que les organisateurs du rallye Dakar ont vraiment le choix ?
C’est tout le problème. La critique d’ASO est aisée, mais où le Dakar aurait-il pu avoir lieu ailleurs ? On est en pleine crise sanitaire et économique. Et l’Arabie Saoudite est un des seuls pays à pouvoir dépenser sans compter pour s’offrir un événement sportif. L’année 2020 a été particulièrement difficile pour ASO, avec beaucoup d’événements annulés, et ça coûte cher. Et finalement, l’Arabie Saoudite lui offre une bouée de sauvetage financière.
Et puis dans les pays démocratiques, les populations sont de plus en plus réticentes à accueillir de grandes compétitions sportives. On le voit avec les Japonais qui ne veulent plus des jeux olympiques.
Pour ces deux raisons, la crainte de Virginie Phulpin est de voir le sport mondial confisqué par quelques riches pays autoritaires, seuls à pouvoir s’aligner. On le voit avec l’Arabie Saoudite, et avec le Qatar bien sûr. Si on regarde ce qui se passe en ce moment en sport, on a le Dakar, le Grand Prix de Judo à Doha, et avec la pandémie, les qualifications pour l’open d’Australie de tennis ont été délocalisées au Qatar et à Dubaï.
Le golfe persique est devenu l’épicentre du sport mondial. Là encore, pourquoi pas. A condition que les fédérations et les sociétés privées qui organisent des événements sportifs demandent des garanties sur les droits humains. Si elles se contentent de prendre l’argent en fermant les yeux, il y a comme une dichotomie avec tous ces sportifs qui mettent le genou à terre.