Tous les samedis dans l'émission Mediapolis, Claire Hazan revient sur l'actualité et la politique par le prisme des réseaux sociaux.
Claire Hazan suit pour Mediapolis les réseaux sociaux. Et ça tombe bien parce que c’est justement un réseau social, Facebook, qui a occupé la une de pas mal de magazines ces dernières semaines. Et pas pour en dire que du bien, on s’en doute…
Dans le New York Times récemment : le moment « Frankenstein de Facebook ». En couverture du magazine Society cette semaine : « Mark Zuckerberg a-t-il perdu le contrôle de Facebook ? », dans Libération : « Facebook : le profil du suspect ».
Suspect, Facebook l’est depuis un moment, ce n’est pas nouveau.
Suspect d’avoir entraîné l’élection de Donald Trump
Suspect d’avoir contribué au Brexit
Suspect de nourrir la croissance des milieux d’extrême-droite
Tout ça toujours pour les 2 mêmes raisons : Facebook favoriserait la diffusion des fake news et enfermerait les internautes dans des bulles idéologiques, où ils ne sont confrontés qu’aux mêmes opinions que les leurs.
Qu’est ce qui a changé alors, pourquoi se repenche-ton sur le cas Facebook dernièrement dans les medias?
Dans les dernières semaines, s’est ouvert un nouvel épisode. Là on est plus dans la suspicion, dans la brume des algorithmes mais dans des faits : Facebook reconnait avoir vendu (à son insu) des espaces publicitaires à des comptes russes, pour une opération d’influence sur la campagne américaine. Le réseau social sera auditionné devant le Congrès américain le 1er novembre prochain.
D’un coup, ça devient très concret : Facebook au cœur de l’élection présidentielle, de l’ingérence russe, qui doit rendre des comptes au Congrès américain. Personne ne peut plus nier ou minimiser l’impact politique de ce qui ne devait être au départ qu’un simple trombinoscope pour se faire de nouveaux amis sur internet.
Vous parliez tout à l’heure de l’article du NYT qui titrait « le moment Frankenstein de Facebook ». Frankenstein c’est une créature qu’on crée mais qu’on ne maitrise pas. Ça veut dire que Facebook aurait été dépassé par sa propre ampleur ?
C’est là que ça devient intéressant, parce que Facebook cultive justement une très forte ambiguïté sur son positionnement.
D’un côté, il tarde à reconnaître ses responsabilités sur les sujets qui fâchent, comme les fake news ou les ingérences russes.
De l’autre, il se positionne clairement comme un acteur social, en développant des fonctionnalités qui relèvent quasiment du service public, (le « safety check » notamment, qui vous permet de vous signaler comme étant en sécurité pendant un attentat etc.)
C’est un exercice d’équilibriste très périlleux…
Oui, sauver le business ou sauver l’humanité… Le paradoxe Facebook tient en une vidéo, qui a fait polémique cette semaine. Mark Zuckerberg veut promouvoir son nouveau service de réalité virtuelle. Pour cela il met un casque, et se projette… à Porto Rico, l’île dévastée par l’ouragan Maria et à laquelle Facebook a d’ailleurs versé 1 million et demi d’aide financière. Dans la vidéo on voit Zuckerberg, sous la forme d’un avatar cartoonesque, se balader virtuellement dans les rues inondées, constater tristement les dégâts… tout en vantant joyeusement les miracles de la réalité virtuelle :
SON Mark Zuckerberg– « On est dans une vidéo à 360° à Porto Rico. On est sur un pont, qui est inondé. Et c’est ça qui est magique la réalité virtuelle, vous avez vraiment l’impression d’être au beau milieu de l’endroit que vous avez choisi »
Chez Facebook, le mélange des genres, même pas peur... Chez les internautes en revanche, ce n’est pas passé du tout, Zuckerberg a du s’excuser pour cette vidéo. Mais tout est là : Sauver Porto Rico ou faire un carton avec son nouveau casque de réalité virtuelle à 200 dollars pièce… Facebook voudrait ne pas avoir à choisir. Et c’est peut-être là, l’une des premières racines du problème.