Tous les samedis dans l'émission Mediapolis, Claire Hazan revient sur l'actualité et la politique par le prisme des réseaux sociaux.
On dit que la Russie serait intervenue dans l’élection américaine pour favoriser l’élection de Donald Trump par le biais de cyber-attaques. Cette semaine le Canard enchainé révèle les inquiétudes du renseignement français : un scénario similaire serait possible dans l’hexagone.
Ils craignent le piratage d’emails, l’attaque des sites des candidats etc… mais aussi une forme plus sournoise de campagne d’influence sur les réseaux sociaux. Et c’est de cela plus précisément dont vous allez nous parler Claire.
On voit sur le web se dessiner un nouvel axe, aux contours flous mais à la force de frappe internationale. Un axe qui allierait l’armée numérique du Kremlin, les trolls américains pro-Trump et la fachosphère française.
On se demande, qu’est ce qui peut bien rassembler cette bande de joyeux lurons? Ils œuvreraient, de façon plus ou moins coordonnée, à la victoire en France d’un candidat de droite, voire d’extrême droite, voire de Marine Le Pen.
Plusieurs indices : un forum américain, révélé par le site Buzzfeed où l’on voit des activistes pro-Trump s’organiser. Ils ont aidé Trump à gagner, ils voudraient maintenant « libérer la France ». Sur ce forum, ils tentent de coordonner des attaques en sous-marin sur les réseaux sociaux français.
Même chose du côté de la Russie.
On apprend dans le Canard enchaîné que la DGSE craint des milliers de robots ou de petites mains à la solde du Kremlin. Elles pourraient œuvrer sur les RS à faire monter un candidat pro-russe, discréditer ses adversaires en répandant des rumeurs. Les médias russes francophones n’ont d’ailleurs pas hésité à relayer cette semaine celles sur Emmanuel Macron.
Ça parait très organisé tout ça mais ça reste assez abstrait. Comment ces armées numériques comptent-elle opérer pour peser sur l’élection française et infiltrer les réseaux sociaux ?
La recette est souvent la même.
Un nombre important de faux comptes crées sur Twitter et Facebook, si possible vraisemblables : une jeune fille sexy, un retraité, un étudiant…
Il faut ensuite coordonner l’activité de ces comptes. Créer du volume en utilisant des robots qui tweetent automatiquement ou en donnant des consignes aux militants. Leur ordonner par exemple d’envoyer en masse des commentaires positifs sur une vidéo de Florian Philippot, ou de critiquer Emmanuel Macron avec un hashtag commun, qui apparaitra alors comme la tendance du moment sur Twitter.
Bref, l’idée c’est de donner l’illusion d’un raz de marée, d’un mouvement populaire spontané. Il faut faire croire que « ça buzz » sur les réseaux sociaux. Et idéalement pousser les médias à relayer cet événement, en réalité gonflé et manipulé artificiellement par un petit nombre de personnes.
J’ai noté quand même dans votre chronique un emploi récurrent du conditionnel…
Ce sont des phénomènes dont on connait mal l’ampleur et l’impact. Il faut des outils spécifiques et du temps pour analyser et détricoter toutes les données des réseaux sociaux. Il y a de plus en plus de spécialistes qui le font. Reste cette question : est-ce qu’on vit les débuts d’une nouvelle cyber guerre froide où tous les coups seraient permis ? Ou est-ce qu’on fantasme des interventions extérieures pour expliquer des élections dont l’issue nous déroute de plus en plus.