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Coraline Brouez
Consommer des produits locaux et de saison a un coût qui refroidit de nombreux consommateurs. Et pour cause, difficile de comprendre une telle différence de prix, notamment avec des produits importés. Pour tenter de répondre à ces interrogations, Philippe Toinard, rédacteur en chef de la revue "180°C", était l'invité de Laurent Mariotte dans l'émission "La Table des bons vivants".
ANALYSE

Avec le premier confinement et la fermeture des commerces, une nouvelle tendance est apparue celle de bien manger en favorisant les produits frais, de saison et locaux. Un mode de vie qui annonçait pour les professionnels du secteur un renouveau et l'espoir pour le "monde d'après". Un monde dans lequel les circuits courts seront toujours favorisés, faisant enfin la part belle aux producteurs. Pourtant, les habitudes ont repris le dessus et les Français sont retournés faire leurs courses en grande surface. En cause, les prix. Bien manger coûte cher, mais pourquoi ? C'est ce qu'ont tenté de comprendre Laurent Mariotte et ses chroniqueurs avec l'aide de Philippe Toinard, rédacteur en chef de la revue 180°C, dans l'émission La Table des bons vivants

Aller-retour

Parmi les principales interrogations concernant les prix des produits locaux, il y en a une qui ne semble pas faire sens, et pourtant : "Certains consommateurs ne comprennent pas que des produits locaux vont être plus chers quand ils sont achetés à côté de chez eux plutôt que loin et en grande surface, par exemple", explique Laurent Mariotte.

Il est vrai que rien ne semble logique dans cet énoncé et pourtant, Philippe Toinard a la réponse : "Prenons l'exemple d'un poisson péché à Lorient. Le poisson est moins cher à acheter à Paris que dans le port de Lorient. Tout simplement parce qu'entre temps, il est parti de Lorient, il est allé à Paris, il a été vendu à Rungis et ce qui reste revient à Lorient, au propriétaire. Donc les coûts de transport sont multipliés par deux et le coût se répercute sur les consommateurs de Lorient." Une aberration logistique qui explique que parfois bien manger coûte très cher. 

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La question des intermédiaires 

Autre point important qui explique la différence de prix : la juste rémunération des producteurs. "Je vais vous donner un exemple. Je suis allé voir un producteur de rhubarbe dans la Somme", explique le rédacteur en chef. "Jusqu'ici, il était en système coopératif. La coopérative lui dit, c'est 1 euros le kilo de rhubarbe, moins le coup du cageot qui est à sa charge. Donc, à ce moment-là, il ne gagne pas grand-chose. Son fils entre dans l'exploitation et avec ce modèle économique, ils ne peuvent pas se verser de salaires. Ils décident alors de changer leur fusil d'épaule en passant à la vente directe. Ils fixent le prix entre 3,50 euros et 4,90 euros le kilo. Et depuis, ils se versent deux salaires et ils sont très heureux." Preuve que, parfois, un prix plus cher révèle simplement une juste rétribution. Et que les prix trouvés en grande surface sont souvent décidés par les intermédiaires qui ne prennent pas en compte le travail des producteurs mais simplement la rentabilité.

Certains intermédiaires vont même plus loin en triplant les prix des produits des producteurs locaux pour favoriser des produits importés et moins chers. Ce qui explique que certains producteurs locaux soient mal représentés dans les grandes surfaces et apparaissent plus chers. Même si cela demande un peu plus de temps, aller directement toquer à la porte des producteurs reste peut-être la meilleure des solutions.