Adèle Haenel était l’invitée de David Abiker, dimanche, dans "C’est arrivé demain". La comédienne à l’affiche du film "Les Ogres" s’est confiée sur son rapport au cinéma.
"Je trouvais le projet super excitant", lance Adèle Haenel. A 27 ans, l'actrice aux deux Césars était l'invitée de David Abiker, dimanche, dans "C'est arrivé demain". Elle y parle du dernier film dont elle figure au générique : Les Ogres, de Léa Fehner, en salles mercredi prochain. Un long-métrage de 2h24, dont une troupe de théâtre itinérant est la flamboyante héroïne. "Ça parle de gens qui ne sont pas vraiment dans la demi-mesure, et du coup qui ont un comportement un peu 'ogresque', que ce soit par rapport à la nourriture, à l’amour, et à l’excès", résume la comédienne réputée pour son franc-parler.
"Le choix d’un rôle, c’est le choix d’un film". Finalement, "le choix d’un rôle, c’est le choix d’un film. Ça ne se discute pas, c’est juste le désir qui fait cela, c'est comme tomber amoureux", poursuit-elle. Un choix d’abord lié à la talentueuse réalisatrice, Léa Fehner, dont Les Ogres est le deuxième long-métrage. Originaire de Toulouse, celle que l'on surnomme "la saltimbanque du cinéma", a grandi au sein d'une troupe de théâtre de rue.
"C’est quelqu’un qui, tout en ayant un désir très fort de quelque chose, accepte de laisser rentrer les gens détruire son projet. A la fois, elle a ce truc très déterminé et à la fois, elle a la lucidité de faire en sorte que, pour que la vie rentre dans son film, et que celui-ci devienne plus que ce qu’elle avait écrit, il faut accepter que les comédiens s’en emparent, et des comédiens un peu versés dans l’irrévérence", développe Adèle Haenel.
Travailler et rester humble. Aujourd'hui figure incontournable du cinéma français, la jeune femme a débuté après avoir été repérée lors d'un casting, à douze ans dans Les Diables de Christophe Ruggia, sorti en 2002. Si le "plaisir est hyper important", Adèle Haenel, qui foule les planches depuis ses cinq ans, est une bûcheuse : "J’adore travailler". Happée par son travail, celle qui s’impose comme principal critère "la sincérité", ne se pose pas trop la question de ce qu'elle représente.
Elle "trace", tout simplement. Et s'investit à fond. "Quand j’arrive sur un film, je me dis que je suis à la disponibilité du réalisateur ou de la réalisatrice, pour essayer d'aller le plus loin possible dans sa vision", explique-t-elle. Cette école de la vérité, Adèle Haenel l’a appris et expérimentée auprès des réalisateurs avec lesquels elle collabore, à l’instar d’André Téchiné. Avec lui, l'actrice, qui a la réputation d'être exigeante pour le choix de ses rôles, a appris à "mettre son ego de côté". Très franc, le réalisateur de L'homme qu'on aimait trop, n’hésite pas : "Il dit : 'bon, c'était nul'", raconte-t-elle en étouffant un rire.
De la classe prépa au cinéma. Césarisée en 2014 pour son rôle de "combattante" dans le premier film de Thomas Cailley, Les Combattants, Adèle Haenel a pourtant failli passer à côté de nos écrans noirs. Après le bac, la jeune originaire de Montreuil, en Seine-Saint-Denis, s'est inscrite en classe prépa à Paris. "J’étais hyper contente", rapporte-t-elle. L'actrice, qui se souvient parfaitement de sa "découverte passionnée" de la philosophie en terminale, avoue avoir pris cela comme "une formation". Mais avec le recul, "l’une des choses que j’ai le mieux fait dans ma vie, c’est de rater les concours", reconnaît celle qui a échoué au concours d’entrée de HEC.
"Je n'oublie pas que ma situation est exceptionnelle". Ce parcours lui permet de ne pas oublier "que [sa] situation est exceptionnelle". Parlant "des jeunes", Adèle Haenel trouve en effet qu'"il y a quand même beaucoup de choses qui pèsent sur nos épaules". Et de développer : "Les gens n'ont aucune raison de ne pas être angoissés. [...] On n'arrête pas de laisser planer la menace au-dessus des gens au nom du mérite : si tu n'y arrives pas, c'est peut-être parce que tu n'es pas le meilleur. C’est terrible, on ne peut pas être le meilleur toute sa vie, c'est impossible. On ne tient pas", estime l'actrice aux grands yeux verts. Elle ajoute ne pas "mériter [sa] situation" : "c'est comme ça, ça doit tomber sur quelqu’un".
Aujourd'hui, Adèle Haenel, qui sera sur les planches du théâtre de l’Atelier, à Paris, dans Old Times d'Harold Pinter, dès le 29 mars prochain, rêve de continuer à s’éprouver par le jeu. "Rencontrer des gens qui me feront travailler, m’emmèneront dans des endroits où je n'irai pas, où je râlerai, et où finalement, je serai trop heureuse d'y être".
Invité(s) : Adèle Haenel, actrice pour le film "les Ogres"