Depuis quelques jours, on assiste à un bras de fer entre des actionnaires individuels qui se sont ligués contre des grands fonds d'investissement à Wall Street. Nicolas Barré fait le point sur une question d'actualité économique.
C'est la folle histoire qui agite Wall Street depuis quelques jours : le bras de fer entre des actionnaires individuels qui se sont ligués contre des grands fonds d'investissement.
Cette meute d'actionnaires individuels a fait mordre la poussière à l'un des grands fonds de Wall Street, Melvin Capital, qui a perdu d'un coup plusieurs milliards de dollars. Et il n'est pas le seul. C'est la revanche des petits contre les grands. Tout a commencé en fait sur Reddit, le réseau social, où ces petits actionnaires individuels ont décidé de lancer une attaque coordonnée contre des grands fonds spéculatifs de Wall Street. Pourquoi ? Parce qu'ils avaient repéré que ces fonds n'arrêtaient pas de vendre à découvert des actions de GameStop, qui est un distributeur de jeux vidéo en mauvaise santé mais dont ils ont décidé de prendre la défense. La vente à découvert est une pratique courante de ces grands fonds spéculatifs. Par exemple, on vous vend des actions GameStop à 18 dollars que vous n’avez pas sur le moment mais que vous empruntez, en faisant le pari que vous pourrez les acheter plus tard à 15 dollars, et donc empocher la différence.
C’est cette mécanique que ces petits actionnaires sont venus enrayer ?
Et voilà ! Ils se sont passés le mot sur WallStreetBets, un forum sur Reddit qui compte plusieurs millions d'inscrits. Ils se sont tous mis à acheter ensemble ces actions pour faire flamber les cours : l'action GameStop avait commencé l'année à 18 dollars s'est envolée à 483 dollars en fin de semaine dernière ! Résultat, ces grandes firmes de Wall Street qui avaient parié à la baisse ont été squeezées et ont perdu des fortunes, on parle d'une vingtaine de milliards de dollars ! Ça a tellement bien marché que ces actionnaires qui agissent en meute se sentent pousser des ailes. Il y a un petit côté libertaire là-dedans, un côté revanche des petits porteurs, qui s'étaient fait rincer en 2008, contre les grands fonds de Wall Street. Allez faire un tour sur Reddit pour voir les messages qui s'échangent : c'est festif, vengeur, avec beaucoup de mots en F***, F-words, comme on dit en anglais, pour montrer qu'ils les ont bien eu, ces géants de Wall Street qui se croient tous puissants et qui s'en mettent plein les poches.
Les prédateurs sont devenus des proies.
Ces particuliers qui sont montés au front se voient comme des justiciers. Ils traquent de nouvelles cibles, toujours pareil : des actions qui ont été vendues à découvert par les grandes firmes de Wall Street. Comme Nokia, Blackberry ou même des sociétés françaises comme Unibail-Rodamco. Bref, il faut compter avec eux. Ce qui change tout, c'est la puissance des réseaux sociaux : quand des millions de petits porteurs se passent le mot, ça peut faire complètement décaler les cours, au-delà de toute raison. Mais la raison n'est pas la chose la mieux partagée sur les réseaux sociaux.