Aujourd'hui, avec Anne Cazaubon, on se demande pourquoi il faut, par l'apprentissage ou par un autre moyen, transmettre pour se trouver un peu.
Anne Cazaubon, aujourd’hui, à l'occasion de la journée spéciale d'Europe 1 sur l'apprentissage, vous nous parlez de transmission et de réparation.
Et je sais bien de quoi je parle. Isabelle, parce que s’il y a bien une matière que l’on n’apprend pas à l’école, c’est bien le développement personnel (et c’est fort dommage, parce que croyez-moi, le monde irait bien mieux si c’était le cas, mais c’est un autre sujet). C’est donc généralement au grès des aléas de la vie que certains choisissent de se tourner vers ces pratiques. Par exemple, d’écrire, non plus pour être noté, ou pour recracher un savoir aussi vite oublié, mais plutôt pour mettre à distance les choses, pour mettre en place ses idées, sa pensée, écrire à un être cher disparu, écrire pour pardonner, ou se pardonner, écrire à l’adolescent que j’étais. Et comprendre par soi-même, dans l’expérimentation. Oui, quand je choisis l’expérience, je reprends du pouvoir sur ma vie.
Pour ma part, c’est en touchant le fond de la piscine du "bouleversement personnel" il y a 15 ans, que j’ai commencé mon apprentissage en développement personnel. Et si je le précise, c’est qu’en osant montrer ses cicatrices aux autres, d’abord on tire une force immense d’oser montrer sa vulnérabilité, mais surtout, ainsi, d’autres peuvent savoir et comprendre, qu’il est possible d’aller mieux, d’aller vers qui ils sont profondément.
Oui, les maîtres d’apprentissage, comme les apprentis, tous, à un moment ou un autre, nous sommes chacun, de petits Padawan. En développement personnel, on appelle cela "la destruction créatrice". Détricoter, tout ce que l’on m’a tricoté, malgré moi, pour revenir à l’essence, à ce que je suis profondément. Depuis ce matin, on entend des témoignages d’apprentis, qui ont trouvé leur voie et qui se sont trouvés, sur ce chemin-là, pour lesquels cette vérité-là se vérifie et fonctionne.
Qu’est-ce que je gagne à transmettre ?
Oui, quand on parle (au premier degré) de transmission, on parle de don. Oui, sauf que cet Autre, auquel je donne, auquel je transmets, c’est un peu comme une partie de moi. Grâce à lui, je me sens un peu plus complet, comme un autre morceau du puzzle, de mon puzzle intérieur : peut-être que ce jeune homme auquel je transmets la technique du bois, ou du verre, me rappelle le jeune homme que j’ai été, avec ses doutes, ses questions, ses angoisses, son chemin chaotique, et que quelque part, en l’aidant, en prenant du temps, je répare quelque chose de profond en moi, parce que moi, je n’y ai pas eu droit, ou au contraire, parce que justement quelqu’un d’autre l’avait fait pour moi avant, et que riche de tout cela, de ce savoir, de ce temps que l’on m’a consacré, je suis prêt aujourd’hui, à donner, en toute conscience. Oui, c’est exactement comme cela que je m’élève, en "élevant les autres", c’est de cette manière-là que je grandis. Oui, quelque part, transmettre, c’est donner naissance, à l’autre, mais aussi à cette partie de soi, que l’on n’avait pas encore identifiée, que l’on n’avait pas encore reconnue, et grâce à laquelle, on se sent davantage complet.