L’opinion publique s’indigne en Allemagne suite à la publication d'un rapport sur les ventes d'armes.
Un rapport sur les ventes d’armes dévoilé mercredi montre que l'Allemagne s’enrichit sur le dos des civils. C’est du moins ce qu’en concluent les élus de l’opposition, la gauche, le parti vert. "Irresponsable", ce sont leurs mots. Les exportations d’armes ont explosé en Allemagne au premier semestre. Après avoir déjà doublé l’an dernier, elles dépassent, sur les six premiers mois de l'année, 4 milliards d’euros.
Et dans un pays pacifiste, responsable tout de même de la Seconde guerre mondiale, on ne s’en réjouit pas. Au contraire, on frise l'apoplexie quand on voit que des pays en crise figurent en bonne place parmi les acheteurs : la Turquie, l’Arabie Saoudite, les Émirats Arabes Unis… Dans un éditorial, le journal Der Spiegel a ce jugement lapidaire : "Ces ventes sont la honte de l’Allemagne, nos munitions inondent un pays ou l’on fouette les bloggeurs, elles criblent les civils du Yémen. Nos valeurs sont piétinées." Un point de vue largement partagé dans l’opinion où l’on se rappelle que le gouvernement d’Angela Merkel avait promis de faire exactement l’inverse.
Le ministre de l’Économie s’était engagé il y a deux ans à limiter les ventes d'armes, ou en tout cas à les encadrer : l’Allemagne allait cesser de fournir les pays tiers, ces pays qui ne respectent pas les droits fondamentaux. Réduire, aussi, ses exportations d’armes de petit calibre, celles qui déciment 95% des victimes dans les guerres. Puis Daech (acronyme arabe de l'organisation État islamique, ndlr) est arrivé, avec ses luttes complexes, ses jeux d’alliances. Bilan : les exportations de munitions ont été multipliées par dix cette année. L’Allemagne vend à la Turquie, à l’Irak… Et c’est avec ces fusils d’assaut, des HK G36 fabriqués sur place, que les Saoudiens font la guerre au Yémen. Des armes qui, au passage, vont aussi équiper la police française.
L’Allemagne est dans le top 5 des exportateurs mondiaux d’armement, et la menace terroriste a clairement réorienté ses priorités. Le gouvernement se défend, en promettant d’être transparent, de vérifier scrupuleusement la destination de ses armes. Et il rappelle que 40% de ses ventes se font avec des pays membres de l’Otan. Encore un paradoxe, d’ailleurs. La France augmente son budget militaire, pour acheter à l’Allemagne et combattre sur des fronts extérieurs, où l’Allemagne ne va pas. On peut être désengagé vous le voyez, et se hisser quand même au premier rang des fournisseurs d’armes…