Chaque matin, Natacha Polony nous présente les différents éditos qui font la Une de la presse.
Ce sont des mots ancrés dans la mémoire collective, des mots qui évoquent des siècles de condition paysanne. "Le capitalisme branché, nous dit Patrick Appel Muller dans l’Humanité, a des allures de féodalité bien comprise et parfois prêchée par certains syndicalistes agricoles qui ont eux-mêmes des intérêts solides dans le système. Mais cette addition de la dîme, des corvées et de la taille provoque dans les campagnes une nouvelle jacquerie". Oui, ils se révoltent. Mais comme le rappelle l’Humanité, ils sont plus nombreux encore à se suicider en silence. Sauf que cette fois, le responsable, du moins le plus emblématique parce que le plus arrogant, voit son nom s’étaler dans les éditoriaux. On n’hésite plus à le nommer, Emmanuel Besnier. Et l’on rappelle ses 10% de marge sur le dos de l’agriculture française. Parce que, comme le rappelle Laurent Bodin dans l’Alsace, "derrière le conflit sur le prix du lait comme dans la crise qui secoue globalement l'agriculture française aujourd'hui, se cache ni plus ni moins un choix de société. La question est de savoir quelle agriculture nous voulons pour la France du XXIe siècle".
Mais pour Jean-Louis Hervois, dans la Charente libre, "le ministre de l’Agriculture Stéphane Le Foll a dû choquer nombre de ses auditeurs quand il a confessé ne pas avoir "a ligne directe" du PDG de Lactalis. Cet aveu d’impuissance n’est pourtant que le constat lucide et désespérant des effets de la dérégulation progressive d’une politique agricole européenne désormais soumises aux seules lois d’un marché mondialisé". Reste tout de même un moyen d’action. Étendre la jacquerie non plus seulement aux paysans mais aux consommateurs. "Trop souvent ignorée par les entreprises au-delà du rapport annuel obligatoire, la responsabilité sociale des entreprises n'est pas une valeur neutre, rappelle Laurent Bodin. Elle doit, au contraire, s'imposer comme un indicateur. Avec Lactalis, voilà le consommateur bien informé". Oui, le consommateur sait désormais quand il achète ses marques préférées, s’il décide la mort d’un paysan. C’est un choix.