Tous les samedis dans l'émission Mediapolis, Claire Hazan revient sur l'actualité et la politique par le prisme des réseaux sociaux.
Après l’attentat de Londres, Donald Trump s’est à nouveau illustré sur Twitter. Contre le terrorisme, il réclame un décret anti-immigration aux Etats-Unis, décret controversé, qui interdirait l’entrée du territoire américain aux ressortissants de 6 pays musulmans.
Ses tweets sans filtre ont fait beaucoup de bruit, comme d’habitude, mais pour une fois cela pourrait bien le desservir.
Bref rappel sur ce décret, rappelez-vous, Trump l’a émis en janvier dernier mais n’a jamais pu réellement l’appliquer. Le décret a été bloqué par la justice américaine, qui l’a jugé anticonstitutionnel. La Maison Blanche a donc retravaillé une seconde version, plus light, qu’elle espère faire valider et pour laquelle elle a saisi la Cour Suprême.
Pour Donald Trump, les attentats de Londres survenus samedi dernier sont la parfaite occasion de marteler l’urgence de cette mesure.
Sur Twitter, avant même d’exprimer son soutien au peuple anglais, comme l’ont fait tous les chefs d’état, il a d’abord exprimé son soutien à… sa propre mesure. Peu après le drame, il a écrit « Il faut arrêter d’être politiquement correct et rétablir le « travel ban ». « Travel ban » - interdiction de voyager-il l’écrit en majuscules et le revendique 5 ou 6 fois, dans une salve de tweets enflammés dont il est coutumier.
Seul souci, « l’interdiction de voyager », quand elle vise une communauté religieuse, c’est précisément ce qui rend le décret de Trump anticonstitutionnel. C’était LE mot à ne pas prononcer. Cela fait des mois que ses conseillers, ses juristes s’échinent à démontrer dans les médias qu’il ne s’agit SURTOUT PAS d’une interdiction, mais d’une « pause momentanée de l’immigration ». Il n’y a pas « travel ban ».
En quelques tweets, le Président américain vient donc de saboter tout l’argumentaire juridique déployé par la Maison Blanche depuis des mois pour faire passer cette mesure au risque d’enterrer son propre décret.
Pourquoi fait-il cela ? Comme souvent avec Donald Trump on ne sait pas trop s’il est victime de son impulsivité ou s’il y a une forme de stratégie derrière…
Il applique sa méthode habituelle. Quand il prend la parole sur Twitter, on peut avoir l’impression qu’il s’adresse à quelqu’un de précis : ici à la justice américaine ou à son propre camp. Mais en réalité sur Twitter il parle toujours aux mêmes : à sa base électorale, à celle qui a envie de croire à un Trump tout puissant, capable d’imposer une interdiction pure et dure, y compris en allant contre son propre camps.
Jusqu’ici cette méthode lui a réussi. Mais cette fois-ci, pour la première fois, il vient peut-être de se tirer un tweet dans le pied.
Ce tweet, celui qui appelle le ban « un ban », ses opposants ont déjà signifié qu’ils n’hésiteraient pas à s’en servir pour le combattre devant la Cour Suprême.