La forêt française, durement affectée par le changement climatique, a vu sa mortalité augmenter de "près de 80% en dix ans", annonce jeudi l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN). Dans son inventaire national forestier, l'IGN constate une "très forte augmentation de la mortalité des arbres" en France métropolitaine, passé à 13,1 millions de mètres cubes par an entre 2013 et 2021, alors qu'il s'établissait à 7,4 millions de m3/an durant la période 2005-2013.
"La surface forestière touchée actuellement par le dépérissement est équivalente au cumul des surfaces touchées par les incendies de ces 35 dernières années", souligne l'IGN.
Prolifération des bio agresseurs
L'accélération de la dégradation de l'état de santé des forêts est en lien direct avec les changements climatiques "qui se manifestent en particulier par des températures plus chaudes et des sécheresses plus fréquentes que par le passé". Ces changements favorisent la prolifération des bio agresseurs, comme les scolytes, des insectes xylophages qui ont décimé les peuplements d'épicéas du Grand Est. L'épicéa commun, l'essence résineuse la plus prélevée en France pour la qualité de son bois destiné à la construction, "est désormais la première essence touchée par la mortalité devant le châtaignier et le frêne", indique l'IGN.
La production de bois d'épicéa, soit le bois produit du fait de la croissance des peuplements, est désormais "inférieure aux coupes et aux arbres qui meurent", notamment du fait de l'ampleur des "coupes sanitaires" pratiquées "pour limiter la propagation des scolytes".
La croissance des arbres a ralenti de 4%
D'une façon générale, l'étude "montre des baisses de croissance des arbres, y compris dans des lieux où les ressources en eau pour les arbres sont censées être les plus élevées", ce qui "s'explique par des baisses plus fortes de précipitations" en France. La croissance des arbres a ralenti. En volume, elle est ainsi passée "de 91,5 millions de m3/an en 2005-2013 à 87,8 millions de m3/an en 2013-2021, soit une baisse significative de 4%", selon l'IGN.
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La souffrance de la forêt a amoindri sa capacité à absorber du CO2, conduisant au "ralentissement du puits de carbone des forêts françaises", qui s'établit à 40 millions de tonnes de CO2 annuels entre 2013 et 2021. Pour les massifs touchés par les scolytes, le bilan net devient "négatif temporairement". Néanmoins, la forêt continue de s'étendre en métropole et se diversifie. Elle couvre désormais 31 % du territoire avec 17,3 millions d'hectares, contre 19% avec 10 millions d'hectares en 1908. L'inventaire a été réalisé à partir de mesures collectées sur près de 70.000 sites d'observation, à l'issue de cinq campagnes de terrain menées de 2018 à 2022.