Des militants de Greenpeace ont tenté en vain lundi matin d'empêcher l'installation d'un terminal méthanier flottant au Havre, un projet porté par le groupe pétro-gazier TotalEnergies et voulu par le gouvernement pour sécuriser l'approvisionnement en gaz du pays, a constaté l'AFP. Trois bateaux semi-rigides de Greenpeace ont rejoint en baie de Seine le méthanier Cape Ann. Ayant échoué à monter à bord, des militants ont alors peint sur sa coque "gas kills" ("le gaz tue") en grandes lettres blanches, a observé un journaliste de l'AFP.
ACTION EN COURS ! Nos activistes sont en mer sur la nouvelle plaque tournante du gaz de schiste.
— Greenpeace France (@greenpeacefr) September 18, 2023
Notre objectif ? Empêcher l’arrivée d’un projet climaticide en France, porté par #TotalEnergies et approuvé par Emmanuel Macron.#GasKills#EndFossilCrimes [1/8] pic.twitter.com/t7Gfr3Pn5w
Puis, en rade du Havre, deux plongeurs se sont mis à l'eau pour gêner la progression du méthanier, qui est entré dans le port peu avant 12h00. "TotalEnergies respecte pleinement le droit de manifester et la liberté d'expression", a commenté la direction du groupe auprès de l'AFP. "Cependant, la sécurité des personnes, notamment des marins et des militants est notre priorité, ainsi que la sûreté de nos opérations", a-t-elle ajouté.
Créer un nouveau point d'entrée de gaz naturel liquéfié
Pour le gouvernement, ce projet vise à créer un nouveau point d'entrée de gaz naturel liquéfié (GNL) en France pour renforcer la sécurité d'approvisionnement en gaz, qui avait subi de vives tensions en 2022 après le déclenchement de la guerre en Ukraine.
La France dispose déjà de quatre points d'entrée de GNL : un à Dunkerque (Nord), un autre Montoir-de-Bretagne (Loire-Atlantique) et les deux derniers à Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône). Ce gaz, transporté à l'état liquide par bateau et regazéifié avant d'être injecté dans le réseau terrestre, est devenu une source d'énergie cruciale pour l'Europe, qui dépendait à 40% du gaz russe avant le conflit en Ukraine.
Le projet de TotalEnergies au Havre a été autorisé en juillet 2022 pour une durée de 5 ans, "par mesure de précaution", selon le ministère de la Transition énergétique. Le Cape Ann a une capacité de 5 milliards de mètres cubes par an, soit l'équivalent de 10% de la demande française.
Pour le ministère, cela ne suffit pas. "La responsabilité du gouvernement est d'anticiper tous les scénarios possibles afin de répondre aux besoins des Français en toutes circonstances : un hiver très long et froid par exemple, un défaut d'approvisionnement ou encore une panne sur une infrastructure existante, qui pourrait entraîner des difficultés", dit-il à l'AFP.
"Hypocrisie" selon Greenpeace
En revanche, Jérôme Frignet, directeur des programmes de Greenpeace, demande que "ce terminal ne soit pas raccordé au réseau" : "On n'a pas besoin de ces nouvelles capacités", juge-t-il auprès de l'AFP. "Depuis l'invasion de l'Ukraine par la Russie, la France a réussi à diminuer de 15% sa consommation de gaz, et on voit qu'en 2023 la tendance est également à la réduction (...) et on a déjà des stocks archi-pleins en vue de l'hiver", a-t-il argumenté lors de l'action du Havre.
Jérôme Frignet dénonce en outre une "hypocrisie" dans ce terminal, qui sera "principalement approvisionné par les Etats-Unis et en particulier par du gaz de schiste produit par fracturation hydraulique, une technique interdite en France".
Plusieurs élus et organisations écologistes avaient contesté en justice l'arrivée du terminal méthanier, estimant comme Greenpeace qu'elle entretenait la dépendance aux énergies fossiles responsables du réchauffement climatique. Tous leurs recours ont été rejetés.