L'Islande retient son souffle. Ce petit pays insulaire du nord de l'Europe, régulièrement soumis aux risques sismiques et volcaniques, pourrait à nouveau subir les conséquences des soubresauts de la Terre. L'Office météorologique islandais a, en effet, observé un phénomène d'accumulation de magma, à environ 5km en dessous de la surface de la Terre, avant de constater la remontée de ce dernier le long d'une fracture verticale, longue de 15km.
Un phénomène géologique directement responsable de l'intensification de l'activité sismique dans le sud de l'Islande, où des milliers de tremblements de terre ont été répertoriés en fin de semaine dernière. Craignant ainsi une possible éruption volcanique, les autorités ont décidé d'évacuer la ville de Grindavík, 3.500 habitants, située à environ 40km de la capitale Reykjavík.
Dégâts matériels ou éruption sans conséquence ?
"Cette fracture de 15km de long est orientée nord-est / sud-ouest et recoupe Grindavík. Le plus probable, si l'éruption a lieu, ce qui est clairement envisageable, c'est qu'elle adviendra le long de cette fracture", avance auprès d'Europe 1 Jacques-Marie Bardintzeff, volcanologue, professeur émérite à l’université Paris-Saclay. Néanmoins, impossible de déterminer avec précision le lieu où le phénomène pourrait survenir. Ni même les conséquences qui s'ensuivraient. "Tout est possible", résume ainsi Jacques-Marie Bardintzeff, avant de passer en revue les différents scénarios.
>> LIRE AUSSI - Italie : l'aéroport de Catane ferme après une éruption de l'Etna
"Si ça se produisait au nord-est, ça prendrait la forme de coulées de lave dans une région inhabitée. Ce serait donc une éruption sans danger immédiat, et donc sans problème", explique l'expert. Un scénario déjà observé à trois reprises en Islande, entre mars 2021 et juillet 2023, sur le volcan de Fagradalsfjall. À l'inverse, d'importants dégâts matériels sont à craindre dans le cas où le volcan entrerait en éruption dans la ville évacuée de Grindavík. Des maisons seraient alors abimées, des routes coupées et des biens publics sérieusement endommagés.
Le risque d'une explosion en mer
Une troisième possibilité, à savoir une éruption au sud-ouest de la fracture, provoquerait, quant à elle, des conséquences plus larges, qui pourraient bien dépasser les frontières de l'Islande. L'explosion interviendrait alors "au bord de mer ou dans la mer" et prendrait la forme d'un mélange eau-magma particulièrement éruptif. "Cette rencontre produit des cendres et des gaz qui peuvent ensuite être emportés par des vents dans différentes directions", éclaire Jacques-Marie Bardintzeff.
>> À LIRE AUSSI - Népal : au moins 143 morts après un séisme de magnitude 5,6 qui a frappé l'ouest du pays
Un scénario qui pourrait alors affecter le trafic aérien, comme ce fut le cas en 2010 lors de l'éruption de l'Eyjafjöll, en raison des projections provoquées par l'explosion. "Des panaches étaient montés jusqu'à 10 km de hauteur", rappelle l'expert, soulignant toutefois la "conjoncture particulière de l'époque", où les vents forts avaient déplacé les particules et les aérosols vers l'Europe continentale. "Pour l'instant, aucune éruption n'a débuté et on ne connait pas le régime des vents", ajoute Jacques-Marie Bardintzeff.
Reste que l'éventualité doit être considérée et ne saurait être totalement écartée. Pas plus que les deux derniers scénarios qui s'intéressent au mouvement du magma. Cet amas de roches fondues pourrait alors bouger et se déplacer ailleurs ou bien se figer en profondeur et ne pas provoquer d'éruption. "On ne peut pas choisir un scénario plutôt qu'un autre. Tous sont plausibles", insiste Jacques-Marie Bardintzeff. Quant à savoir à quel moment les Islandais seront fixés sur leur sort, c'est à nouveau l'incertitude qui prédomine. "Ça peut commencer dans quelques jours, ça peut aussi s'arrêter et reprendre dans un ou deux mois", conclut le spécialiste.