A son procès, Nemmouche raconte son parcours de combattant
Mehdi Nemmouche a livré ce jeudi un récit sur son parcours en Syrie, où il s'est retrouvé au sein de l'Etat islamique "sans le savoir". Il est jugé devant la cour d'assises spéciale de Paris pour avoir détenu quatre journalistes français pour le compte du groupe Etat islamique en Syrie en 2013.
A l'en croire, il n'est pas un geôlier, mais un combattant. Bavard comme jamais, Mehdi Nemmouche a livré jeudi à son procès un récit, choisi, de son passage en Syrie en 2013-2014, où il s'est retrouvé un beau matin au sein de l'Etat islamique "sans le savoir".
Ce jeudi matin, le jihadiste de 39 ans a choisi de répondre aux questions, enfin certaines, devant la cour d'assises spéciale de Paris.
"Secret défense" en réponse aux questions qui le gênent
Vêtu d'un pull blanc aux motifs nordiques, il parle à toute vitesse, dit en somme que peu importe s'il a rejoint des groupes terroristes. "Je ne le regrette absolument pas", dit-il dans un récit rempli de références historiques et géopolitiques concernant les Etats-Unis, l'Algérie ou l'Indochine. "Si vous n'avez plus d'armée, il ne vous restera que le terrorisme, parce que le terrorisme est l'arme du pauvre", lance-t-il accusant les armées occidentales de "crimes effroyables en quantité industrielle".
Le président lui demande de ralentir, "vous parlez trop vite". La raison ? "Onze ans d'isolement total", et un pli de dire tout très vite, car en prison les parloirs sont toujours trop courts, le téléphone cher. Selon le récit qu'il livre à la cour, Mehdi Nemmouche est parti en Syrie début janvier 2014, avec 8.000 euros en poche.
Pourquoi la Syrie ? Parce que c'était dans l'actualité. Mais "si la Papouasie Nouvelle-Guinée envahissait la France, je serais prêt à défendre la France". Il ignorait la réalité du terrain : "J'avais jamais guerroyé avant ça".
A-t-il combattu ? Oui, "quand vous êtes un jeune homme de moins de 30 ans, vous n'allez pas distribuer des boîtes de conserve". Il déroule son récit, répond fréquemment régulièrement "secret défense" quand les questions le gênent.
"Ce qui se passe à Vegas reste à Vegas"
En avril 2013, le Jabat Al-Nosra, qu'il avait rejoint, connaît une scission. "C'est là que j'ai découvert que j'étais dans l'Etat islamique sans le savoir", assure Mehdi Nemmouche. "J'ai jamais changé d'activité", pas toujours dans la même unité mais "je dirai pas le nom". "Secret défense", encore une fois.
Le président tente la flatterie : "Si vous faites la guerre pendant un an, c'est que vous êtes un bon soldat", pour essayer d'en savoir plus, s'il a pu rejoindre des groupes plus spécialisés.
Mehdi Nemmouche raconte avoir été blessé par balle au genou en janvier 2014, puis son départ en passant par la Turquie pour aller en Malaisie, avant un voyage en Asie du Sud-Est. Sur un mot découvert dans sa cellule en 2016, il évoquera "une overdose de sexe". La cour n'en saura pas plus : "Ce qui se passe à Vegas reste à Vegas".
Confronté aux éléments du dossier, comme celui d'Alexanda Kotey, l'un des "Beatles" de l'EI, ainsi surnommés à cause de leur accent britannique, Mehdi Nemmouche conteste, bien qu'il soit reconnu sur photo. "Qu'il vienne s'expliquer, je lui dirai face à face que je ne le connais pas", lance-t-il. "On lui a proposé un paquet de biscuits, une canette de coca, il dit amen", accuse Mehdi Nemmouche. Alexanda Kotey a été entendu en tant que témoin aux Etats-Unis, où il a été condamné à la prison à vie.
L'accusé balaie d'un revers de main : "Une pluralité d'insuffisances ne fait pas une suffisance". Quant à sa position sur l'attentat du musée juif de Bruxelles de mai 2014, pour lequel il a été condamné en Belgique à la réclusion criminelle à perpétuité pour quatre assassinats terroristes, il répond encore "secret défense". "Il y a une vérité judiciaire", dit-il, "il va falloir s'en contenter".