"L'évocation de ce drame suscite naturellement de l'émotion", a commencé Julien Ruas, qui était alors en charge de la prévention et de la gestion des risques urbains sous Jean-Claude Gaudin. "Mais j'ai l'impression d'être traité comme le bouc émissaire idéal dans cette affaire. Je suis ici pour défendre mon honneur, celui des services municipaux, et prouver qu'il n'existe aucun lien entre les manquements qu'on me reproche et cette catastrophe," a-t-il ajouté.
Les copropriétaires et l’expert également en défense
Des copropriétaires accusés, cités à comparaître par certaines des 87 parties civiles, ont également nié toute responsabilité. "Je ne vois pas en quoi mon appartement était indigne. J'ai des preuves des travaux réalisés," a affirmé Gilbert Ardilly. Xavier Cachard, ex-élu du conseil régional et avocat, a dénoncé une présomption de culpabilité : "En tant que propriétaire, on nous traite d’assassins. Mais un propriétaire n’est pas responsable des parties communes."
Richard Carta, l'architecte expert accusé d'avoir manqué de rigueur dans son expertise, menée moins de trois semaines avant le drame du 5 novembre 2018, a quant à lui soutenu que "si les travaux qu'il avait recommandés avaient été réalisés correctement, l'effondrement n'aurait pas eu lieu."
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L’émotion palpable parmi les familles
Ces premières déclarations ont eu lieu en fin d’audience, dans une salle moins remplie que le premier jour mais où les familles des victimes étaient toujours présentes, pleines d’attentes. Le président du tribunal, Pascal Gand, a rappelé l'impact de cette catastrophe sur tous les Marseillais, estimant que ce procès vise aussi à prévenir de futurs drames dans une ville marquée par les taudis.
Maitre Emmanuel Daoud, avocat de la famille de Julien Lalonde, l'une des victimes, a souligné que ce dossier ne concernait pas seulement la vétusté des logements et l’inaction politique, mais aussi "l'âpreté au gain et la rapacité de certains propriétaires-bailleurs."
Initialement, seuls quatre prévenus avaient été mis en accusation : l'ancien adjoint au maire, l’expert architecte, un syndic et un bailleur social. Cependant, des parties civiles ont réussi à citer directement une dizaine de copropriétaires. "Il était impensable pour les familles que les copropriétaires échappent au procès," a expliqué Maitre Brice Grazzini, avocat de plusieurs parties civiles.
Une attente immense, au-delà des victimes directes
Maitre Mourad Mahdjoubi, en référence aux mots des supporters de l'Olympique de Marseille, a déclaré : "Il y a une réponse à apporter pour tout le peuple marseillais." De son côté, Maitre Christophe Bass, avocat du syndic Liautard, a reconnu la profondeur de l’émotion entourant cette affaire mais a rappelé l’importance de juger en droit.
Enfin, des avocats de la défense ont soulevé des questions sur le manque de précisions dans les accusations portées, notamment en termes de travaux incriminés et de dates, soulignant qu’ils manquaient d’éléments pour une défense adéquate.
Les demandes des avocats de la défense ont été "jointes au fond" par le président du tribunal correctionnel, ce qui signifie qu’elles seront examinées dans le jugement final. Mardi prochain, le procès entrera dans sa phase substantielle avec l’audition attendue de la directrice d’enquête.