Marseille et sa mythologie, Netflix et son savoir-faire, Gérard Depardieu et Benoît Magimel, l’école française face au style hollywoodien. Lorsque la plateforme américaine de streaming à l'origine de House of Cards a annoncé sa première production française consacrée à la cité phocéenne, l’enthousiasme et l’attente étaient de rigueur. Fin de suspense vendredi avec la mise en ligne de la saison 1. Vous hésitez encore ? Voici quelques indices utiles avant de se lancer dans les méandres de Marseille.
• Que raconte la série ? Marseille suit la rivalité grandissante entre un maire en fin de carrière, interprété par Gérard Depardieu, et son premier adjoint qui est aussi son fils spirituel, incarné par Benoît Magimel. A l’origine, le premier pense transmettre le flambeau du pouvoir au second, non sans arrière-pensée : conserver son influence sur la ville. Sauf que le premier adjoint ne va pas hésiter à trahir son père spirituel à la première occasion pour tenter de prendre sa place et s’affranchir de toute tutelle. C’est donc l’histoire d’une transmission de pouvoir contrariée, avec en toile de fond une ville marquée par le clientélisme et le banditisme. Bref, sur le papier, on est a priori loin du petit monde de Plus belle la vie.
Marseille - Bande-annonce principale - Netflix...par mirainonews
• Un House of Cards "avé" l’accent ? De la politique, des protagonistes sans états d’âme, des trahisons. Lorsque Netflix a annoncé le tournage de Marseille, les observateurs n’ont pas tardé à faire le parallèle avec une autre de ses créations : le très cynique House of Cards, porté par Kevin Spacey. D’autant que la cité phocéenne semble un lieu idéal pour de telles histoires, au regard de la fantasmagorie que suscite cette ville.
Sauf que ce n’était visiblement pas l’intention du créateur de la série, Dan Franck. "On a toujours dit que c’était un House of Cards à la française, c’est une erreur absolue. House of Cards est une série politique, Baron Noir est une série politique. ‘Marseille’, pas du tout. C’est une histoire psychologique entre un père et un ‘fils’ qui s’empoignent dans le cadre des élections municipales à Marseille", a-t-il expliqué dans les colonnes de L’Obs.
• Il paraît que la critique est très, très sévère... Il n’y a pas débat, les critiques sont aussi assassines que les attentes étaient élevées. "C'est une débandade artistique, un raté industriel pour Netflix, sans doute son premier navet ‘maison’, qu'on découvre d'abord surpris, puis consterné, enfin hilare", tacle Telerama. Les Inrocks est sur la même ligne et décrit une série "aussi surfilmée que vide de sens et de capacité à émouvoir". Le Monde n’est pas plus indulgent : "En langage châtié, cela s'appelle un accident industriel. En langage courant, cela s'appelle une bouse".
Il n’y a que La Provence pour prendre la défense de la série. "Les échos entre fiction et réalité, auxquels nous ont habitué les séries américaines, sont savoureux. Le scénario de Marseille en joue comme nul autre", indique le quotidien avant de louer la "réactivité" et "l’humour" de ce projet. Il faut néanmoins dire que le journal est juge et partie puisqu’il se retrouve au cœur de l’intrigue et que plusieurs scènes ont été tournées dans ses locaux.
• On en pense quoi chez Europe 1 ? Sans aller jusqu’à descendre la série, il est difficile de cacher sa déception. Malgré des moyens importants et un casting de choix, la mayonnaise – ou plutôt l’aïoli - prend difficilement et on se retrouve avec un projet qui n’est pas à la hauteur de ce que Netflix propose habituellement. Divertissant mais pas mémorable au regard des cinq premiers épisodes que nous avons pu visionner.
La faute à un scenario qui ne fait pas vraiment dans la nuance : l’enjeu de la série est explicité dès les dix premières minutes, les trajectoires des protagonistes se télescopent de manière trop rapide pour sembler réaliste, le tout saupoudré de scènes de sexe aussi lourdes que trop fréquentes. Qu’on considère Marseille comme un thriller politico-mafieux ou un mélimélo familial, un peu plus de non-dits et de clairs obscurs auraient permis à la série de gagner en épaisseur et en réalisme.
Et le montage n’aide pas, haché par des plans qui s’enchaînent à un rythme effréné et des effets sonores aussi lourds que trop présents. Bref, Marseille veut aller vite, trop vite, et déroule son histoire à un rythme qui ne colle pas vraiment avec celui de la cité phocéenne. D’autant plus dommage que la municipalité a visiblement ouvert en grand les portes de Marseille, permettant au spectateur de découvrir de l’intérieur la mairie et ses dépendances, le conseil municipal, le Vélodrome, le Cercle des nageurs, La Provence, etc.
• Au fait, quand peut-on la voir ? Les plus impatients ont intérêt à se tourner vers le site de Netflix, qui a produit la série : comme elle en a l’habitude, la plate-forme de streaming propose l’intégralité de la première saison dès le jeudi 5 mai. Pour les autres, il faudra patienter le 12 mai et la diffusion de deux épisodes en première partie de soirée sur TF1.