Au cœur de la grogne des intermittents du spectacle : la réforme de leur régime d’assurance chômage, qui sera tranchée le 30 juin prochain. Leurs représentants réclament au ministre du travail, François Rebsamen, de ne pas donner son agrément à l’accord du 22 mars, pourtant signé par trois syndicats sur cinq ainsi que par le patronat. C'est dans ce contexte très tendu que Jean-Michel Ribes, le directeur du Rond-Point, Jean-Michel Ribes, s'est exprimé sur Europe 1 sur cette épineuse question.
Quelle est l’ambiance au théâtre du Rond-Point ? Il y a à la fois "une inquiétude, à la fois une révolte et un malaise", répond Jean-Michel Ribes, le directeur du théâtre, au micro d'Europe 1. Mais ce n'est pas, pour lui, une "souffrance de corporation", précise-t-il. "On va un peu élever le débat : c'est quelque chose qui concerne tout le monde, tous les Français."
Mise au point. "Il faut qu'ils sachent, quand on entend les gens dire "oh tous ces emmerdeurs, ces privilégiés etc", que ce n'est pas vrai", tient à rappeler Jean-Michel Ribes. Si Paris attire plus de touristes que Londres, c'est "parce qu'il y a une offre culturelle extraordinaire". Sans cette offre, explique-t-il, "il y a 29 millions de personnes qui ne vont plus venir. La culture fait partie de notre ADN. C'est peut être la seule chose qu'il nous reste de fort et de vivant en France. Notre pétrole, c'est la culture."
Alors pourquoi aujourd'hui, "pour une poignée de gens qui sont dans une précarité énorme, qui ne demandent pas la lune", confie-t-il, pourquoi ce blocage avec le Medef, avec la CGT et FO ? Jean-Michel Ribes ne comprend pas.
Des effets très concrets sur la culture dans les mois à venir ? Si le gouvernement agréait l'accord du 22 mars ? "Le théâtre du Rond-Point s'arrête. Tout simplement parce que le théâtre fonctionne pour moitié avec des intermittents et pour moitié avec des permanents.
Retour aux définitions. C'est quoi un intermittent ? Le directeur du Rond-Point tient à recadrer les choses sur ce point : "Ce ne sont pas des gens qui ne foutent rien, un comédien il ne peut pas jouer 365 jours sur 365 ! Il s'arrête, il reprend... Vous savez, il y a beaucoup de gens qui ne gagnent rien. Et quand après n'avoir rien gagné, il faut encore qu'ils ne gagnent rien pendant un mois et demi, deux mois, il y a quelque chose qui n'est pas possible ! Le chômage, en France, doit être respecté pour tout le monde ! Et je ne crois pas non plus que l'intermittence, quoiqu'on en dise, coûte si cher qu'on le dit. Tout ça me semble désespérant."
Du très sérieux. Au-delà d'enlever au panache de la France, sur le plan culturel, Jean-Michel Ribes voit dans cette réforme "une attaque à quelque chose qui a fondé la démocratie. La démocratie c'est la liberté. Et la liberté d'expression, comme la liberté de la presse, sont la base de notre République. On est en train de la foutre en l'air. Il ne va plus y avoir de création, ça va être récupéré par je ne sais quel ordre moral, genre Front National. Je ne veux pas faire de l'apocalypse mais il y a quelque chose de très grave qui est en train de se passer. Il faut que vos auditeurs comprennent que ce sont eux qui vont être les otages de tout ça."
Que faire alors ? Selon Jean-Michel Ribes, "il faut un moratoire, ne pas signer cette convention et se mettre autour de la table", car "tout le monde reconnait qu'il y a un dysfonctionnement. Quand Manuel Valls ou le médiateur Jean-Patrick Gille disent qu'il faut une autre architecture, c'est vrai. Alors faisons là, sans signer cet accord. Si on signe c'est fini."
LA QUESTION DU JOUR - Faut-il supprimer le régime des intermittents ?
L'ESSENTIEL - Intermittents : les clés pour comprendre le conflit
DÉTERMINÉS - Les intermittents appellent à "amplifier la grève"
POLITIQUE - Valls décrit un "système arrivé à bout de souffle"
AVIGNON - "Vers une annulation" si l'accord sur les intermittents est maintenu