Une "rock star" christique, éprise de vérité et de fureur créatrice : c'est le nouveau visage du célèbre peintre "Caravage" proposé par le réalisateur italien Michele Placido, dans un film éponyme, en salles mercredi. Incarné par l'acteur Riccardo Scamarcio, choisi par le réalisateur pour son étonnante "ressemblance avec le peintre dans certains de ses tableaux", cette co-production franco-italienne retrace un moment de la vie du peintre d'une haute intensité dramatique.
L'histoire s'ouvre dans un décor poisseux et pluvieux
Accusé de meurtre, Le Caravage a fui Rome et s'est réfugié à Naples. Soutenu par la puissante famille Colonna, il tente d'obtenir la grâce de l'Église pour revenir à Rome. Le Pape décide alors de faire mener par un inquisiteur, l'Ombre, une enquête sur le peintre dont l'art est jugé subversif et contraire à la morale de l'Église.
Aux côtés de Riccardo Scamarcio, Louis Garrel (L'Ombre), Isabelle Huppert (Costanza Colonna) et sa fille, Lolita Chammah (Anna Bianchini) complètent la distribution du film, qui a été tourné dans la langue de Dante. L'histoire s'ouvre dans un décor poisseux et pluvieux, reconstitué afin de "réaliser un film authentique, sale, loin de la tentation d'une reconstitution léchée", explique à l'AFP le réalisateur, 76 ans, ancien flic des rues de Rome, qui fut aussi acteur sur les planches et au cinéma, avant de prendre la caméra. Il a "fait appel à des historiens comme Vincenzo Pacelli tant pour la grande fidélité des reconstitutions historiographiques des tableaux" du Caravage que pour sa vie et sa mort.
Le Caravage "a été l'un des premiers metteurs en scène de l'histoire et même l'un des premiers chefs opérateurs", dit-il. "Il utilisait des personnes qu'il mettait en scène comme s'il s'agissait d'un véritable plateau de tournage, avec des lumières et des ombres recréant fidèlement sa vision d'une scène de vie". C'est le cas de son chef d'œuvre "La mort de la Vierge", tableau emblématique conservé au Louvre, "qui a fait scandale parce qu'il a utilisé une célèbre prostituée de l'époque, Anna Bianchini, pour représenter la Vierge. Il reproduisait la scène et mettait ensuite tout sur la toile", ajoute-t-il.
L'une des forces du film : la reconstitution de scènes bibliques et de vie
L'une des forces du film tient à cette reconstitution de scènes bibliques et de vie, dans des couleurs extrêmement fidèles aux toiles du Caravage, avec des mendiants et parias de la société comme modèles vivants, ce que l'Eglise va lui reprocher même si certains de ses membres ne pourront s'empêcher d'admirer son génie. C'est précisément "un Caravage qui s'oppose à la somptuosité de l'Église", que le réalisateur dit avoir voulu mettre en scène avec "une image un peu rock".
Ses nuits agitées de fêtes et de tourments succèdent à des journées de déambulations ininterrompues. Le Caravage ne semble s'arrêter que lors de fulgurantes inspirations où toute son attention est retenue par la vision d'une scène qu'il va peindre.
Michele Merisi da Caravaggio, son vrai nom, francisé Carvage ou Le Caravage, est né en 1571 à Milan. Il a d'abord choisi la voie ecclésiastique "avant de consacrer toute sa vie à représenter les +derniers+, les plus aimés par le Christ: les gens du peuple, les prostituées, les gens de mauvaise réputation, les pauvres, les parias de la société", souligne Michele Placido.
Le film offre une plongée spectaculaire dans les ateliers d'artistes de l'époque où apparaît Artemisia Gentileschi, née à l'époque de l'Académie de Capo de Fiori et qui fut l'une des premières femmes peintres de l'histoire. On suit aussi Le Caravage en prison où il croise Giordano Bruno, lors de son exécution.