Mensurations irréelles, maquillage marqué et allure sexy, les héroïnes de dessins animés sont-elles parfois trop sexualisées et stéréotypées ? Récemment dans un article sur Slate.fr, la journaliste Titiou Lecoq s'était émue que Netflix ait "mis des seins à Sophie" dans la nouvelle version du dessin animé Inspecteur Gadget. La bloggeuse et auteure de Libérées (Fayard) débat de cette question de la sexualisation des dessins animés face à Tiphaine de Raguenel, directrice des activités jeunesse de France Télévisions et directrice exécutive de France 4, dans Europe matin.
Stéréotype et identification. Le point de départ de la réflexion de Titiou Lecoq est donc né d'un constat : Sophie d'Inspecteur Gadget a changé, elle est maintenant très mince et a des seins. "Et ce n'est pas la seule. Cela concerne un peu tous les remakes de vieux dessins-animés comme Charlotte aux fraises, Dora l'exploratrice : les héroïnes ont été redessinées pour être plus féminines", souligne Titiou Lecoq. La journaliste dénonce notamment "un impératif de minceur". "C'est extrêmement paradoxal, car si on prend la Reine des neiges, qui est plutôt féministe, un personnage féminin fort, elle est beaucoup plus sexualisée si on la compare avec Blanche-Neige par exemple", estime-t-elle.
Selon Titiou Lecoq, cette représentation soulève le problème des stéréotypes féminins mais aussi celui de l'identification. "J'ai montré Inspecteur Gadget à mes enfants qui sont des garçons. (...) Dans l'ancienne version, n'importe quel enfant pouvait s'identifier. Il n'y avait pas de barrière de genre ou de sexe", confie la journaliste. Avec la présence d'un corps féminisé, "qu'on ne peut pas ne pas voir", "ils s'identifient moins, (...), cela crée une distance avec le personnage."
Ne pas mettre tous les dessins animés dans le même panier. De son côté, Tiphaine de Raguenel tient à rappeler qu'il faut bien différencier les dessins animés, notamment en fonction de l'âge des enfants. "Pour les plus petits (de 3 à 5 ans, ndlr), on s'attache vraiment à avoir des représentations diverses et qui ne mettent pas en avant un corps féminin stéréotypé", affirme la directrice des activités jeunesse.
Autre distinction très importante à effectuer, le pays de production. "Dans ce débat, il est très important de distinguer l'animation internationale, qui a tendance à standardiser un peu les représentations, notamment des personnages de filles, et ce qu'on peut faire dans l'animation française", explique Tiphaine de Raguenel. À France Télévisions, elle indique ainsi que des efforts sont effectués. "On essaye de favoriser la diversité. Mais ça ne veut pas dire qu'on s'interdit d'avoir des filles en rose et qui ont une allure un peu genrée car cela existe. Mais il ne faut pas que ce soit la seule", précise la directrice exécutive.