Jean-Pierre Jeunet, réalisateur du Fabuleux destin d'Amélie Poulain (2001) ou encore de Delicatessen (1991), accuse le cinéaste Guillermo del Toro de "copie", avec son nouveau film La forme de l'eau. Le long-métrage du cinéaste mexicain, qui doit sortir le 21 février prochain, a reçu le Lion d'or lors du dernier Festival de Venise et il est le grand favori pour la prochaine cérémonie des Oscars, avec 13 nominations.
Au micro de Patrick Cohen, Jean-Pierre Jeunet détaille sa pensée. "Ce n'est pas un coup de gueule. J'ai juste écrit à mon ami Guillermo del Toro en lui disant : 'tu exagères un peu, tu as assez d'idées et d'imagination pour ne pas copier-coller les thèmes des copains'", explique-t-il. "C'est simplement que là, c'est un peu copié-collé, quand il utilise des scènes qui ont déjà été faites et qu'elles ne servent pas à grand chose", souligne le cinéaste.
"Effectivement, il y a des ressemblances". Thomas Baurez, journaliste à Studio Ciné Live, a vu La forme de l'eau et il connaît bien la filmographie de Jean-Pierre Jeunet. "Effectivement, il y a des ressemblances", estime-t-il. "D'un côté, on a Jean-Pierre Jeunet, qui sent que son oeuvre a été dépossédée. Et de l'autre, un créateur comme Guillermo del Toro, un cinéphage, qui récupère sans arrêt les formes des autres cinéastes, mais aussi des peintres. Il cite énormément de références", indique Thomas Baurez.
Pour expliquer ce mécanisme de réappropriation, Thomas Baurez prend en exemple un autre art. "Dans l'histoire de la peinture, il y a des maniéristes qui se sont dit : 'on a atteint une certaine perfection, qu'est-ce qu'on fait de tout ça ?'". Eh bien ils ont repris ses formes pour les emmener ailleurs", détaille-t-il. "J'ai l'impression que Guillermo del Toro fait un peu la même chose, conscient ou pas".
"Si ma fille le dit, cela doit être vrai". Conscient ou pas ? Mathieu Charrier a tout simplement posé la question à Guillermo del Toro, lors d'une interview. "C'est marrant ce que vous dites, car ma plus jeune fille m'a dit la même chose. Je n'en étais pas conscient, je me suis inspiré de Terry Gilliam et Gilliam influence Jeunet : il y a peut être un peu de ça. Mais si ma fille le dit, cela doit être vrai", avait déclaré le réalisateur mexicain.
Loin d'en faire une "affaire", Jean-Pierre Jeunet préfère voir le bon côté des choses. "Je n'ai jamais utilisé le mot plagiat. Simplement il y a s'inspirer des autres et prendre des scènes et les refaire. On va dire que c'est un hommage", conclut-il dans un sourire. "C'est un beau film et je lui ai même souhaité bonne chance pour les Oscars".