Les nouvelles mesures de restrictions décrétées par le gouvernement dans 19 départements s'étendent (au moins) jusqu'au 17 avril. D'autres régions "en sursis" pourraient suivre. Pour faire passer le temps plus vite, Europe 1 vous conseille huit bons livres tout juste sortis en librairie. Classées "commerces essentiels" en février, celles-ci restent autorisées à ouvrir. De l'Irlande du Nord au Québec, en passant par une prison américaine et par une bourgade du Jura, vous pourrez voyager sans quitter votre canapé.
Les oubliés, de John Grisham
Le maitre du thriller judiciaire est de retour avec Les oubliés. Le héros, Cullen Post, est un avocat, ancien pasteur, qui travaille pour une association chargée de rouvrir de vieux dossiers et de libérer des détenus condamnés à tort. Cullen Post se penche sur le cas de Quincy Miller, un noir accusé du meurtre de l’avocat qui s’était occupé de son divorce. Il croupit en cellule depuis 22 ans. Cullen Post se rend vite compte que la plupart des témoins ont été achetés et les preuves falsifiées. Mais qui avait intérêt à faire condamner Quincy Miller. Et à tuer un avocat ? La narration est tendue, les rebondissements incessants. Du pur Grisham.
> Aux éditions Lattès, 22,90 euros.
Milkman, d’Anna Burns
Dans cette ville anonyme d’Irlande du Nord, la narratrice menait une vie plutôt tranquille jusqu’à ce que la rumeur se répande : elle serait la maitresse du soi-disant laitier, gros bonnet de la lutte armée. Ce n’est pas vrai mais le mal est fait, car à l'époque il est dangereux d'attirer les regards. A travers le portrait d’une jeune femme, Anna Burns raconte la guerre civile des années 1970 avec ses bombes, ses assassinats et sa ligne infranchissable entre "eux" et "nous". Elle ne donne de noms ni aux lieux ni aux personnages. La Grande-Bretagne est "le pays de l’autre côté de l’eau", la narratrice est la "sœur du milieu", harcelée par "Laitier", embêtée par "Machin McMachin" et aussi mal vue par ses voisins que "la fille aux cachetons". Milkman a été récompensé du Man Booker Prize, équivalent britannique du prix Goncourt.
> Aux éditions Joëlle Losfeld, 22 euros.
Les enfants sont rois, de Delphine de Vigan
Delphine de Vigan n’est pas inscrite sur les réseaux sociaux et navigue assez peu dans ce monde. Mais un jour, elle découvre l’existence des chaines Youtube familiales. Des parents qui mettent en scène leurs enfants pour montrer une vie de famille idéale et heureuse. Elle décide d’en faire un roman. L’héroïne a toujours rêvé de faire de la télé-réalité, mais en vain. Un jour, elle a l’idée de filmer ses enfants et ça marche enfin. Mais lors d’une partie de cache-cache, sa fille est enlevée. Manifestement, le kidnapping est lié à la chaine Youtube lucrative. Demande de rançon ? Dénonciation politique ? Il faut lire pour savoir.
> Aux éditions Gallimard, 20 euros.
Aller aux fraises, d’Eric Plamondon
Trois nouvelles sur la vie ordinaire. Eric Plamondon s’inspire de sa jeunesse dans le Québec des années 1980 pour livrer le tendre récit d’un passage à l’âge adulte. Il y raconte des histoires réjouissantes ponctuées de bières avec les "chums" (les copains), d’amours avec les "blondes" (les copines), et de courses en "chars" (les voitures). "Ce que je savais, c’est que je venais d’avoir dix-huit ans et que tout était possible", dit-il, sillonnant les villes, les bars et les routes sans fin du Canada. Un livre aussi bref qu’émouvant, qui entremêle les aventures du fils et les souvenirs du père.
> Editions Quidam, 12 euros.
L’inconnu de la poste, de Florence Aubenas
Montréal-la-Cluse, 19 décembre 2008. Catherine Burgod, postière de la commune, est assassinée de 28 coups de couteau. Un crime non élucidé sur lequel Florence Aubenas, grand reporter au Monde, a enquêté pendant six ans. Elle commence par planter le décor : une petite ville du Haut-Bugey, dans le Jura, autrefois "étape en vogue sur la route de Genève ou de l'Italie", aujourd’hui cernée par les usines de plastique. Elle présente ensuite les protagonistes : la postière, son ex mari, son père, ses amies. Et puis Gérald Thomassin. Le jeune acteur césarisé, gueule d’ange déjà fracassée par la vie, vient de débarquer de Paris et zone avec deux marginaux. La police le suspecte vite. Florence Aubenas conjugue rigueur journalistique et qualité littéraire dans une enquête passionnante aux allures de roman noir.
> Aux éditions de l’Olivier, 19 euros.
Florida, d'Olivier Bourdeaut
Dans l’univers des "mini miss", les petites filles portent des chaussures à talons, mettent des faux cils et se font tartiner d’autobronzant. Avant de souffler leurs 10 bougies, certaines ont déjà subi quelques coups de bistouri. C’est dans ce monde glaçant que nous entraine le troisième roman d’Olivier Bourdeaut, auteur du très remarqué En attendant Bojangles. Elisabeth, ex-mini miss pleine de haine et de rancune envers ses parents, veut se venger d’avoir été "transformée en poupée". Elle s’en prend à son apparence jusqu’à gommer tout ce que sa mère lui avait imposé. Elevée dans le culte du corps parfait, dressée à séduire des jurés, l’ex princesse envoie tout balader. Un conte cruel dont on ne sait plus à la fin si l’on doit rire ou pleurer.
> Aux éditions Finitude, 19 euros.
Seul entouré de chiens qui mordent, de David Thomas
David Thomas est le maître de la micro-nouvelle. Une histoire complète, avec une intrigue, de l’émotion, des rebondissements, une fin, mais en quelques lignes : maximum deux pages. Dans ce nouveau recueil, David Thomas propose une centaine de nouvelles drôles, émouvantes, tristes, gaies, intelligentes, spirituelles. Tout sonne juste. Son précédent recueil était intitulé Un homme à sa fenêtre et résume bien la posture de l’écrivain. Il regarde le monde et nous le raconte avec ses moments poétiques, courageux, lâches, beaux et laids. Un recueil de David Thomas, c’est un paquet de bonbons à garder dans sa poche et que l’on sort de temps en temps pour lire deux ou trois textes comme autant de douceurs.
> Aux éditions de l'Olivier, 18 euros.
Toni tout court, de Shane Haddad
Le jour de ses 20 ans, Toni se réveille avec "quelque chose entre le cœur et la gorge qui lui donne un air chagrin". Commence alors la journée d'errance d’une jeune femme hantée par le regard des autres, les critiques de sa mère, le "sale pute" craché par un inconnu et le "je ne t’aime pas" de celui qu’elle convoite. Mais à son malaise se mêle d’emblée une impatience féroce : ce soir-là, c’est soir de match. Toute la journée - le temps du livre - la fidèle supportrice anticipe la foule, le bruit, les chants et les barquettes de frites. Elle en oublie un peu de sa mélancolie. Dans son premier roman, Shane Haddad, 24 ans, dresse le portrait touchant d’une jeunesse qui se cherche à tâtons. Avec l’adrénaline du stade en toile de fond.
> Aux éditions P.O.L, 17 euros.