Peut-on représenter Hitler sur grand écran, et en faire une comédie ? La question se pose depuis des décennies - on pense notamment au Dictateur de Charlie Chaplin -, et elle revient sur le devant de la scène avec la sortie le 29 janvier de Jojo Rabbit, du réalisateur Taika Waititi, dans lequel il joue lui-même le rôle d'Hitler. Des journalistes américains ont accusé le film de complaisance avec le nazisme, mais le réalisateur s'en défend. Au contraire, dit-il.
Montrer la guerre du point de vue d'un enfant
Il est vrai que l'intrigue a de quoi surprendre. Jojo est un petit Allemand fervent nationaliste, en pleine Seconde Guerre Mondiale. Il vénère tellement Hitler qu'il en a fait son meilleur ami imaginaire : il discute avec lui, plaisante, s'interroge sur son quotidien et la marche du monde... On les voit à l'écran, ce qui, évidemment, montre le Führer sous un angle très humain.
Lors de sa sortie aux Etats-Unis, certains journalistes ont accusé Jojo Rabbit d'être un film complaisant avec le nazisme, voir même négationniste. Alors que d'autres louent ce vieux principe de s'amuser de l'horreur pour mieux la dénoncer. Taika Waititi, le réalisateur qui incarne Hitler à l'écran, se défend. Il affirme qu'il s'agit avant tout d'un drame, et qu'il a voulu montrer la guerre du point de vue d'un enfant. "La première fois que j'ai proposé ce script, c'était en 2011. On n'était pas encore dans la période de crimes de haine ou de discours de haine qu'on connaît aujourd'hui. Puis je suis revenu à ce script en 2017. Et là, la Fox m'a dit, 'On a vraiment besoin de faire ce film. Vu la merde en ce moment, c'est vraiment le moment de le réaliser'", confie-t-il.
Le film dénonce les nationalismes
"Je ne pense pas que ce soit une comédie", ajoute aussi Taika Waititi. "C'est plus un drame, mais que l'on peut montrer aux enfants dès l'âge de dix ans. Ce genre de film, ça les fait réfléchir, ça les encourage à penser par eux-mêmes." D'autant que dans le film, Jojo va découvrir que sa maman cache une jeune juive dans les combles de sa maison, ce qui va remettre en question ses certitudes. Le film dénonce alors les nationalismes, l'endoctrinement, le fanatisme quel qu'il soit.
Les spectateurs et les professionnels ont déjà tranché cette polémique puisque le film a raflé le prix du public au festival de Toronto, et qu'il est nommé dans 6 catégories aux Oscars.