Paris, 1980. Michel Rocard se rend rue de Bièvre, au domicile de François Mitterrand. Le premier cherche le soutien du second, en vue de l'élection présidentielle de 1981. L’opposition, Mitterrand VS Rocard, pièce de Georges Naudy, mise en scène par Eric Civanyan au théâtre de l'Atelier, à Paris, présente cette discussion d'une heure et demie entre les deux hommes, mêlant discours authentique et remarques imaginées. Le journaliste, humoriste et comédien Cyrille Eldin, qui interprète Michel Rocard, présente la pièce au micro de Philippe Vandel, jeudi sur Europe 1.
"La plupart des échanges ont été prononcés par l'un ou par l'autre, sur plusieurs mois, et parfois dans leurs dos. La pièce, c'est un condensé", explique-t-il. La suite, on la connait : premier secrétaire du Parti socialiste, François Mitterrand se présente à l'élection tant convoitée par Michel Rocard, et l'emporte face au président sortant, Valéry Giscard d'Estaing. "L'échange met face à face le cynisme de Mitterrand, et le pragmatisme de Rocard", souligne Cyrille Eldin.
"Le mépris, ça se mérite"
La discussion en question aurait eu lieu à initiative de Jacques Attali, alors proche collaborateur de François Mitterrand. "A part ça, ils ne se parlaient jamais. Mitterrand ne supportait pas Rocard", assure Cyrille Eldin. Sur scène, la tension qui règne entre les deux hommes est palpable. Le futur président se permet quelques saillies bien senties. "Pourquoi avez-vous autant de mépris pour moi ?", interroge Michel Rocard. Son concurrent réplique, cinglant : "Je n'ai aucun mépris pour vous. Le mépris, ça se mérite."
Cyrille Eldin incarne un Michel Rocard un peu fébrile, mais qui porte ses idées avec enthousiasme et conviction. Un politicien que l'acteur connaissait bien, ayant grandi avec un père fervent rocardien. "Je l'entendais répéter à quel point Rocard était merveilleux. Il s'est fâché avec des gens en le défendant", raconte l'acteur. Mais la pièce va au-delà d'une simple discussion, poursuit-il. "On comprend à la fin pourquoi Mitterrand a finalement été candidat. Ce n'est pas que cynisme, du machiavélisme. Certes, c'est un monarque, mais il incarne la France."