Oscarisé pour le film Indochine, Régis Warnier n'a plus sorti de film depuis Le temps des aveux en 2004. C'est par la littérature qu'il se rappelle à son public en publiant Les prix d’excellence. Invité dimanche dans l'émission Il n'y a pas qu'une vie dans la vie, le réalisateur et auteur a expliqué ce choix, en pesant les avantages et inconvénients du livre face au film.
Moins pudique en littérature. Pour autant, les deux arts ne s'opposent pas dans l'esprit du cinéaste. Raison pour laquelle son ouvrage est "né d’une ou deux idées de film. J’avais deux histoires en tête, celle de Mathilde et celle de Georges, les personnages principaux." Deux protagonistes et deux histoires qu'il a pu réunir dans un seul livre. "J’avais le bonheur d’écrire des scènes dignes d’une super production, sauf que je n’avais pas à les filmer. J’aime écrire et quand j’écris un scénario, je me restreins. Je suis frustré. La qualité d’un scénario, c’est que ça doit être très succinct et qu’on doit tout voir", ajoute Régis Warnier qui regrette la règle : "une page de scénario égale une minute de film".
Le livre lui a permis d’élargir son horizon, en termes d'espace, de temps, mais aussi d'érotisme. "Les mots ont un peu choqué des gens que je connais", ce qui lui fait croire qu'il est plus pudique au cinéma qu'en littérature. "La pudeur, c’est celle des acteurs, aussi. Dans le roman, j’avais beaucoup plus de liberté pour ce type de scènes parce que chacun se fera ses images."
les épreuves du financement et de la sortie. Autre argument en faveur du papier : la difficulté de plus en plus actuelle de monter un film de bout en bout. "J’avais un peu envie de prendre de l’air vis à vis du cycle d'un film. Ça dure deux ans et demi, avec évidemment des moments de bonheur qui sont le tournage, l’action. Le plus compliqué, c’est d'abord l’attente du financement, vous ne pouvez pas engager les techniciens et les acteurs car vous n’êtes pas sûr de faire le film", décrit l'acteur, qui redoute aussi un second moment, crucial : la sortie du film. "Cette journée est pour moi la véritable épreuve du metteur en scène."
L'intensité du cinéma. Entre ces deux phases stressantes, le "cinéma a quelque chose de fascinant, d’un peu hors du monde. Je fais, en plus, souvent des films loin de Paris, on bosse mieux quand on est dans le même bateau. Les gens se disent 'on va se voir dix semaines, après on ne se verra plus. Chacun va aller dans la relation à l’autre plus vite, plus haut, plus fort'. Si le cinéma ne rend pas fou, il rend extrêmement intense", souligne le réalisateur pour qui parler d’un film, est aussi "plus chatoyant. On peut s’appuyer sur le rôle des acteurs, sur l’aventure. Parler trop d’un roman, c’est le déflorer."
C'est peut-être une des raisons pour laquelle il se dit prêt à replonger pour la caméra, avec un gros bémol : "Indochine, aujourd’hui, on ne pourrait plus le faire. Ce sont des risques financiers, des films d’époque qui coûtent cher. Peu de producteurs prendraient le risque de tels budgets." Le public aussi a évolué selon lui : "Les gens ont une impatience de l’image. On acceptait le rythme d’un film", avant, mais il l'assure : "Le cinéma a bougé."