29 euros pour un Marseille-Madrid : les trains de la compagnie espagnole Renfe valent-ils vraiment le coup ?

Les trains espagnols de la Renfe débarqueront sur le réseau français d'ici le 13 juillet.
Les trains espagnols de la Renfe débarqueront sur le réseau français d'ici le 13 juillet. © JOEL SAGET / AFP
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Romain Rouillard / Crédit photo : JOEL SAGET / AFP
À partir de la mi-juillet, les AVE - équivalents du TGV - exploités par la société espagnole Renfe circuleront sur le réseau français et promettent des tarifs particulièrement attractifs pour des trajets à destination de l'Espagne. Mais dans les faits, il pourrait être bien difficile d'obtenir les précieux sésames.

266 euros. En ce lundi 3 juillet, c'est le prix qui s'affiche sur le site SNCF Connect pour un aller-simple Marseille-Madrid pour le vendredi 28 juillet. Le trajet dure 9 heures et 50 minutes et nécessite deux correspondances à Montpellier (où il faut changer de gare) puis Barcelone. Bref, un parcours du combattant et une carte-bleue en surchauffe. Mais à compter de la mi-juillet, les TGV de la société espagnole Renfe débarquent sur le réseau français. Et pour ce même trajet entre Marseille et la capitale espagnole, la compagnie ibérique propose, depuis le 21 juin, un itinéraire direct d'un peu plus de huit heures pour seulement 29 euros, tout en desservant de nombreuses villes, en France comme en Espagne, tout au long du parcours.

Et ce n'est pas tout puisque la Renfe proposera également des billets pour rallier Barcelone depuis Lyon à des tarifs très attractifs. De quoi décupler les envies d'ailleurs des voyageurs français pour cet été. Toutefois, la réalité pourrait être un brin plus nuancée et les fameux billets à prix cassés bien plus difficiles à dénicher. "C'est le principe du prix d'appel. Vous avez quelques places qui seront à disposition mais pas beaucoup. D'ailleurs, je ne pense pas que la Renfe se lance dans une guerre des prix", observe Arnaud Aymé, spécialiste des transports au cabinet SIA Partners. 

Pratiquer des prix cassés en France ? Mission délicate

L'expert met d'ailleurs en parallèle ces prix d'appel promis par la Renfe avec ceux déjà pratiqués par la SNCF. Pour constater que la différence est loin d'être flagrante, ni même particulièrement favorable à la compagnie espagnole. "Sur son TGV Paris-Barcelone, la SNCF promet un prix d'appel de 39 euros. C'est 10 euros de plus que Lyon-Barcelone avec la Renfe mais vous parcourez 500 kilomètres de plus", souligne Arnaud Aymé. Ces précieux sésames se cacheront avant tout sur des trajets peu demandés et ce dès l'ouverture des ventes au public. Autrement dit, un Marseillais aura bien du mal à dégoter un billet pour Madrid à 29 euros pour le week-end du 14 juillet.  

Décevant, oui, mais pas illogique. Car il aurait été bien difficile pour une compagnie étrangère de se lancer dans une véritable guerre des prix dans l'Hexagone. Le terrain n'y est guère propice. "La SNCF et Trenitalia (compagnie italienne qui opère également sur l'axe Paris-Lyon Ndlr) ont proposé des prix cassés en arrivant en Espagne car la Renfe pratiquait des prix élevés et n'était pas vraiment positionné sur du low-cost. Mais en France, la SNCF a commencé à se concurrencer elle-même avec Ouigo. Et c'est difficile d'être moins cher que Ouigo", note Arnaud Aymé. 

Sans compter le coût, particulièrement élevé en France, du péage ferroviaire dont les compagnies doivent s'acquitter pour pouvoir faire circuler leurs trains sur les infrastructures. "Le prix des péages de lignes à grande vitesse est deux fois plus cher, ramené au kilomètre, en France par rapport à l'Italie ou l'Espagne. Donc les coûts ne peuvent pas être trop tirés vers le bas en France", explique Arnaud Aymé. 

L'exemple de Trenitalia 

Néanmoins, l'arrivée prochaine des trains de la Renfe ne sera pas sans conséquences sur les prix proposés aux voyageurs. Et ces tarifs pourraient même évoluer favorablement. Sur l'axe Paris-Lyon, et d'après les chiffres de la plateforme de réservation Trainline, ils se sont contractés de 8% depuis que l'Italien Trenitalina opère sur cette ligne à grande vitesse. Le consommateur pourra également tirer un autre bénéfice avec l'apparition d'un nouvel acteur sur les lignes ferroviaires tricolores, indique Arnaud Aymé. "Il y aura plus d'offres, plus de places disponibles".

Lorsque les rames de la SNCF atteindront un taux de remplissage élevé et que le prix flamberont, conséquence du yield management pratiqué par les compagnies ferroviaires, les voyageurs pourront ainsi se retourner vers des trains opérés par Trenitalia ou la Renfe, possiblement moins remplis et donc moins chers. Dans un communiqué, la Renfe dit vouloir devenir "un opérateur de référence sur le marché ferroviaire français" et aspire à se positionner sur l'axe Lyon-Paris afin de rallier la capitale en vue des Jeux olympiques de Paris-2024