Pour son premier projet de loi, Ségolène Royal a de quoi faire. La ministre de l'Ecologie et de l'Energie présente depuis la semaine dernière son projet de loi "relatif à la transition énergétique pour la croissance verte", dont les députés ont entamé l’examen lundi. Un texte touffu qui a nécessité deux années de préparation et qui ne manque pas d’ambition : diviser par deux la consommation énergétique finale de la France d’ici 2050. Avec une étape déjà programmée à mi-parcours : avoir déjà réduit notre consommation de 20% en 2030.
Pour atteindre un tel objectif, le gouvernement va agir sur de nombreux leviers : l’isolation thermique, le verdissement de l’automobile, le développement des énergies renouvelables ou encore l’amélioration du recyclage. Europe1.fr vous résume les principales réformes à l’étude.
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Améliorer le bilan énergétique des logements. C’est principalement sur le logement que le gouvernement veut agir, dans un pays où l'on dépense en moyenne 590 euros par an et par personne pour se chauffer, selon les chiffres de l’Insee datant de 2006.
La loi fixe donc pour objectif que le parc immobilier français soit entièrement rénové aux normes "bâtiment basse consommation" (BBC) en 2050. Tous les travaux de ravalement de façade, de toiture ou d’agrandissement devront obligatoirement prendre en compte la rénovation énergétique. Pour inciter les Français à jouer le jeu, le gouvernement prévoit plusieurs dispositifs : un allègement fiscal, un éco-prêt à taux zéro ou encore un "chèque énergie" pour les ménages les plus modestes.
Accélérer le passage à la nouvelle génération de voitures. L’instauration du bonus/malus a fait ses preuves mais l’écart de prix entre une voiture classique économe et les véhicules hybrides ou électriques est encore trop grand. Le gouvernement va donc réformer ce système pour inciter à acheter les nouvelles générations de véhicule. A titre d’exemple, un automobiliste qui abandonnera un véhicule diesel pour une voiture électrique pourra espérer jusqu’à 10.000 euros d’aide. Et pour achever de convaincre les Français, l’Etat s’engage à installer 7 millions de points de charge pour les véhicules électriques d'ici 2030 sur tout le territoire.
En outre, l'Etat et les établissements publics vont montrer l’exemple : un véhicule acheté sur deux devra être "propre". Ce devra aussi être le cas de 10% des taxis, voitures de transport avec chauffeurs (VTC) et voitures de location renouvelés avant 2020.
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Renforcer les énergies renouvelables. Elles représentent actuellement 13,7% de notre consommation d’énergie. Or si l'hydroélectricité est un point fort du modèle français, c’est moins le cas pour les autres énergies renouvelables.
Le projet de loi prévoit donc de multiplier les aides financières : 400 millions d'euros pour doubler en 2017 le fonds chaleur, qui soutient la production issue de sources renouvelables (bois, biomasse, déchets, recyclage...), et 100 millions d'euros pour financer 1.500 projets de méthanisation. L’éolien off shore va également être encouragé.
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Et réduire la part du nucléaire, mais… Sur le papier, l’objectif est clair : réduire la part du nucléaire dans notre électricité de 75% aujourd’hui à 50% en 2025. Mais dans le détail, la situation est plus floue : il n’est jamais précisé quelle(s) centrale(s) nucléaire(s) pourraient être fermées, alors que le candidat Hollande avait promis de fermer en 2016 la centrale de Fessenheim, la plus vieille de France.
L’ancienne ministre de l’Ecologie, Delphine Batho, entretient le doute. La députée, qui doit bientôt sortir un livre à charge notamment sur la question de l'influence des lobbies, a déjà déploré un "enterrement de première classe" de la question du nucléaire dans le projet de loi. Seule certitude, l'Autorité de sureté nucléaire va renforcer ses contrôles.
Recycler plus, recycler mieux. Nos sociétés modernes consomment beaucoup mais recyclent peu, alors même que nos poubelles ont une grande valeur. Le gouvernement souhaite donc diviser par deux les quantités de déchets mis en décharge d'ici 2025, pour arriver à 55% de déchets recyclés.
Pour limiter le flux de déchets, la réforme s’attaque enfin à un sujet polémique : "l'obsolescence programmée", c’est-à-dire lorsqu’un produit est conçu pour ne plus fonctionner au bout d’un certain temps. Cette mort annoncée pourra être pénalement punie comme une tromperie. Dernière mesure, qui n’est pas que symbolique : l’interdiction des sacs en plastique à usage unique.
Une transition énergétique coûteuse mais qui peut rapporter gros. L’ampleur des réformes annoncées confirme que la transition énergétique aura un coût. Mais l’objectif est, à moyen et long terme, de réaliser de substantielles économies : un logement moins énergivore et une voiture plus économe sont la promesse d’une facture allégée pour les consommateurs. Sans oublier qu’une telle transition pourrait relancer l’emploi, Ségolène Royal allant jusqu’à pronostiquer "100.000 emplois dans les filières de la croissance verte" en trois ans.