"C'est une chose que nous examinerons." C'est par cette brève phrase qu'a répondu Pierre Moscovici, interrogé lundi soir sur la possibilité qu'il prenne la tête de l'Eurogroupe. Le poste de président de l'instance qui rassemble les ministres des Finances de la zone euro sera vacant dans quelques semaines. Et d'après le Financial Times Deutschland, le Français "aurait de bonnes chances" de le reprendre. "Le ministre des Finances français devrait succéder à Juncker", titre même le journal mardi.
Le Premier ministre luxembourgeois, Jean-Claude Juncker, a pour sa part avancé lundi soir sa volonté définitive de quitter la présidence "d'ici la fin de l'année 2012 ou le début de l'année 2013". Et celui qui occupe ce poste depuis sa création, en 2005, a prévenu : il faut lui trouver un remplaçant avant son départ car cette fois, il ne prolongera pas.
"Nous devons examiner de manière collective qui sera le successeur de M. Juncker", et "le choix sera délicat", a reconnu Pierre Moscovici, au cours d'un point de presse. "Il est important que la France et l'Allemagne soient d'accord sur ce point", a-t-il poursuivi. Car tout le problème est là.
Hollande avancerait son pion contre l'Allemagne
La rumeur d'une candidature de l'actuel locataire de Bercy date de juin dernier. À l'époque, le quotidien économique allemand Handelsblatt affirme que François Hollande veut placer son pion Moscovici pour contrecarrer une présidence allemande de l'Eurogroupe. Car Berlin souhaite que son propre ministre des Finances, Wolfgang Schäuble, prenne les rênes. Or l'Élysée estime alors, selon Handelsblatt, que l'Allemagne est trop puissante et influente pour exercer le poste, qui consiste, entre autres, à jouer la médiation et la coordination entre les divers ministres de la Zone euro.
Outre le projet de contrecarrer l'Allemagne, Pierre Moscovici pourrait viser ce poste pour une autre raison : promouvoir son projet de créer un ministre des Finances de la zone euro soumis au vote des citoyens. Et il peut être motivé par le fait que Wolfgang Schäuble a peu de chance de gagner, de l'aveu même de Berlin, car il représente une ligne politique trop austéritaire.
Un tandem en alternance?
"Il n'est pas temps de spéculer", insiste toutefois Pierre Moscovici, soucieux de n'alimenter aucune rumeur. Une prudence autant de mise que, de sources élyséennes, François Hollande ne serait plus trop motivé pour se mettre à chercher un nouveau ministre des Finances. De plus, l'Allemagne n'est pas non plus emballée par l'idée que la France, elle aussi une grande puissance, joue le rôle de président de la zone euro.
L'idée d'un tandem entre Wolfgang Schauble et Pierre Moscovici a un temps été évoqué dans les couloirs de l'Eurogroupe. Selon le Financial Times Deutschland, la Chancelière allemande, Angela Merkel et François Hollande auraient convenu en juillet d'une présidence de deux ans, alternant entre Pierre Moscovici et son homologue allemand. Mais aucune source officielle n'est jamais venue confirmer.
"Pas forcément un ministre"
Le choix ne se fera "pas forcément" parmi les ministres des Finances actuellement en poste, avance Pierre Moscovici. Allant dans ce sens la ministre autrichienne des Finances, Maria Fekter, est entrée mardi dans le débat pour réclamer un poids lourd. "C'est un poste pour un dirigeant de la zone euro, président ou Premier ministre", a affirmé la ministre, à son arrivée à Bruxelles pour une réunion avec ses homologues européens.
Les noms du Premier ministre finlandais, Jyrki Katainen, et de l'actuel président du Conseil italien, Mario Monti, ont eux aussi circulé. Il ne leur reste plus que quelques semaines pour trancher.