19 produits autorisés, dont 11 de Monsanto. Une nouvelle étape vient d'être franchie sur le lourd dossier des OGM en Europe. La Commission européenne a autorisé vendredi l'importation et la commercialisation de 19 nouveaux OGM (4 étaient déjà admis) sur le territoire de l'UE pour les dix prochaines années. Sur ces 19 produits, 11 appartiennent à la très controversée compagnie Monsanto. En contrepartie, la vingtaine d'Etats-membres -dont la France- opposés à l'usage d'OGM sur leur sol pourront ouvertement interdire leur présence sur leur sol. Une nouveauté, puisque depuis la mise en place de la directive OGM en 2001, les Etats devaient recourir à toutes sortes de ruses et de mesures exceptionnelles (mesure de sauvegarde du territoire, mesure d'urgence sanitaire) pour interdire ces organismes génétiquement modifiés.
La fin de 15 ans de blocage ? Pour sortir de cette impasse, la Commission avait fait des propositions de simplification des démarches d'interdiction dès 2010. Mais pour être actées, ces démarches devaient être validées en Conseil européen, où sont représentés les Etats-membres. Et c'est bien là que, jusqu'ici, le bât blessait. Car les partisans d'une harmonisation et d'une ouverture totale de l'UE à la culture des OGM (Royaume-Uni, Espagne) refusaient de voter la simplification des démarches dans l'optique de faire pression sur les Etats plus frileux, bloquant ainsi le processus. Mais après 15 ans de blocage, les deux camps se sont accordés pour une solution… qui ne contente finalement personne.
Facilitation de l'interdiction. En juin dernier, le Conseil des ministres de l'environnement avait validé les propositions de la Commission autorisant les Etats-membres à interdire les OGM sur leur sol sans recourir à des astuces juridiques. Désormais, Paris pourra par exemple évoquer des impératifs de politique agricole ou économique. En clair, les démarches pour interdire les OGM seront assouplies.
Le diable se cache dans les détails. Mais comme souvent, le diable se niche dans les détails. Et le texte adopté force tout de même les Etats opposés aux OGM à négocier avec les semenciers sous l'égide de la Commission européenne pour interdire les produits. Si les entreprises ne sont pas d'accord avec la décision, les Etats devront se justifier auprès de l'EFSA (Autorité européenne de la sécurité des aliments). Un système qui, en somme, permet de régler les litiges au cas par cas selon les législations nationales. Et fragilise le cadre réglementaire européen, selon l'eurodéputée Corinne Lepage qui dénonce "un marché de dupes et la porte ouverte à la contamination de l'agriculture européenne".
José Bové très véhément. Autre point faible du texte dénoncé par les associations de lutte contre les OGM, la solidité juridique de ce texte. Selon Eric Meunier de l'association Inf'OGM cité par Le Monde, "il y a un risque pour les Etats de voir leur échapper le débat sur l'évaluation et sur les risques des OGM". Et pour cause, mobiliser l'argument du risque socioéconomique pour interdire les OGM pourrait permettre aux semenciers de déposer un recours devant l'OMC. Sur ce dossier, José Bové, lui, porte clairement une attaque à l'encontre du président de la Commission :"Jean-Claude Juncker se couche devant le lobby des entreprises transgéniques. Il se moque des consommateurs européens qui depuis le début sont opposés aux plantes transgéniques".
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