L’INFO. C’est bientôt la fin d’un privilège dont bénéficiait les sites de vente de livres en ligne, Amazon en tête. Le Sénat a adopté dans la nuit de mercredi à jeudi à l’unanimité la proposition de loi destinée à empêcher les opérateur en ligne de cumuler la gratuité des frais de port et la remise autorisée de 5% sur les livres. Un moyen de rétablir une concurrence plus loyale avec les libraires qui ne devrait néanmoins pas faire exploser les prix d’Amazon.
Quand vous commandez aujourd’hui... Lorsqu’on achète un livre sur Amazon, deux mentions attirent l’oeil. Déjà, un prix barré et un nouveau prix, preuve de l’application du rabais de 5% réservé à tous les livres en France en vertu de la loi Lang de 1981. Cela dit, sur toutes les offres, on voit également la mention “livraison gratuite “ apparaître.
Ce double rabais, Amazon a le droit de le pratiquer depuis un arrêt du Conseil d’Etat. Il peut surtout se permettre de le pratiquer du fait de ses accords très intéressants avec les livreurs, accords que ne peuvent pas négocier les libraires indépendants. C’est d’ailleurs sur la base de cet avantage que s’est positionné le site de vente. “Amazon fait du dumping sur les frais de port en acceptant de perdre de l’argent parce que sur la masse de client, il y gagne”, résume Vincent Monadé, le président du Centre National du Livre (CNL), à Europe1.fr.
Une addition plus salée en vue. La loi votée à l’Assemblée prévoit de supprimer la livraison gratuite et de faire passer le rabais de 5% sur le prix de la livraison du livre. Autrement dit, si on fait de la livraison gratuite, il n’y aura plus de rabais. Ainsi, si on estime les prix futurs, on s’aperçoit que la facture pourrait être salée.
Prenons l’exemple du Goncourt 2013, Au revoir là haut de Pierre Lemaître, vendu à l’heure actuelle 21,38 euros sur Amazon (avec le rabais de 5%). Désormais, il devra être vendu au prix éditeur, soit 25 euros. Si on lui ajoute le prix de livraison de 7,99 euros appliqué par le site aux DVD et qu’on y déduit le nouveau rabais, le livre serait vendu à 31,74 euros, soit une augmentation de plus de 48%.
Même si la loi n’est pas encore définitivement votée, avec la confirmation par le Sénat, Amazon sait qu’il ne devrait pas y échapper. “Toute mesure visant à augmenter le prix du libre sur Internet pénaliserait d’abord les consommateurs Français en affaiblissant leur pouvoir d’achat”, déplore d’ailleurs d’ors et déjà un porte-parole d’Amazon France auprès d’Europe1.fr.
Amazon devra s’adapter. Le site ne pouvant naturellement pas faire bondir ainsi ses prix, sa politique économique va donc devoir évoluer. “La négociation qu’elle aura avec les transporteurs aura de l’importance, confirme Vincent Monadé. Je pense qu’au final, ça ne coûtera pas beaucoup plus cher au consommateur, mais en tout cas cela évitera à Amazon d’afficher ‘frais de port gratuits’ et ‘remise de 5%’”.
Objectif “concurrence loyale”. Les sénateurs qui ont débattu pendant la nuit de mercredi à jeudi ne sont d’ailleurs pas dupes du fait que cette nouvelle loi ne permettra pas de sauver à elle tout seule les librairies de France. Avant même de pouvoir leur permettre de concurrencer sérieusement le géant américain, ce nouveau système cherche à rétablir une forme de concurrence loyale dans le secteur.
“Le but de la loi n’est pas de diminuer la vente de livre en ligne. On revient simplement à la philosophie de la loi de 1981. Il ne doit pas y avoir de concurrence sur le prix du livre parce que c’est le vecteur des pensées. Le prix du livre doit être le même partout,” conclut-on dans l’entourage de la ministre de la Culture.
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