L’Etat convoite les réserves de l’Agirc-Arrco. Ce mercredi, les organisations patronales et syndicales se réunissent pour définir les règles de gestion du régime Agirc-Arrco, qui gère les retraites complémentaires des salariés du privé, pour la période 2023-2026. Fin du malus qui obligeait les salariés à travailler un an de plus pour éviter une décote temporaire, revalorisation du montant des retraites complémentaires à hauteur de l’inflation ou pas, cumul emploi retraites… plusieurs sujets sont sur la table.
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Mais un troisième acteur vient s’inviter dans cette discussion initialement bipartite : l’Etat. Le gouvernement a calculé que la réforme des retraites, entrées en vigueur le 1er septembre, va faire rentrer, au total, 22 milliards d’euros sur 15 ans dans les caisses du régime. Pour financer sa promesse de revaloriser les petites retraites à hauteur de 100 euros par mois maximum, l’exécutif s’estime donc fondé à puiser 1 à 3 milliards d’euros par an dans les caisses de la complémentaire. De quoi mettre en colère les gestionnaires du régime, qui s’y opposent frontalement et dénoncent un hold-up sur les cotisations des salariés. Mais qu’en pensent les principaux intéressés ?
"Un abus de pouvoir"
Dans ce quartier d’affaires en plein centre d’Issy-Les-Moulineaux, dans les Hauts-de-Seine, les salariés ont choisi leur camp. Pour les partenaires sociaux, qui gèrent leurs futures retraites complémentaires, et contre le gouvernement, dont ils dénoncent l’attitude. À l’image de Mikael : cet employé dans l’immobilier ne comprendrait pas que l’Etat pioche dans ses cotisations de retraite complémentaire. "C’est assez scandaleux franchement, c’est un abus de pouvoir pour moi, de l’Etat", s'indigne-t-il au micro d'Europe 1.
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Même indignation pour Marc, qui travaille dans un groupe hôtelier international. "C’est injuste parce qu’on cotise pour nous. Et que ce n’est pas à l’Etat de prendre dans nos cotisations", déplore le salarié. Corinne est cadre dans une société de production cinématographique, et pour elle aussi, le gouvernement va trop loin. "C’est du détournement de fonds versés quelque part et qui en fait vont aller ailleurs. Et tout ça décidé par l’Etat. C’est du racket ça, un peu. Voilà, ce que je pense", souligne la cadre.
Malgré toutes ces critiques, le gouvernement ne veut pas reculer dans ce ce dossier. Sa réforme des retraites doit rapporter 22 milliards d’euros sur quinze ans dans les caisses de l’Agirc-Arrco. L’Etat peut donc légitimement s’attribuer une part du gâteau, pour financer la revalorisation des petites pensions. L’Agirc-Arcco dispose de réserves conséquentes, 68 milliards d’euros, ce qui représente 9 à 10 mois de prestations.
Les syndicats s'indignent
Le souhait du gouvernement de ponctionner jusqu'à 3 milliards d'euros par an dans les réserves de la complémentaire est inacceptable pour Christelle Thieffinne, secrétaire confédérale du syndicat CFE-CGC. "L'Etat fait une réforme. Il s'aperçoit qu'il ne sait pas la financer et donc il nous demande de le faire. La réponse est toujours non, on va résister à cette tentative. Et ce qu'on espère, c'est que collectivement, on sera tous sur la même ligne", souligne-t-elle au micro d'Europe 1.
De son côté, la CFDT est sur la même ligne justement à l'image d'Yvan Ricordeau, négociateur pour le syndicat. "Les cotisations des salariés du privé construisent les droits à venir pour les futurs retraités du privé. Et donc, il n'y a aucune logique à ce que cet argent-là aille dans les caisses de l'Etat. Il y a un deuxième non-sens, c'est que l'Etat a abandonné un projet de réforme d'un système universel de retraite. Donc aujourd'hui, il ne peut pas nous expliquer qu'il faudra mettre en place une solidarité entre les régimes", déplore-t-il.