Le conflit semble inextricable, au quatorzième jour de grève à Air France. Les salariés ont rejeté vendredi les 7% de hausses de salaires étalées sur quatre ans proposées par le PDG. Jean-Marc Janaillac, qui avait mis son avenir dans la balance, a donc annoncé sa démission dans la foulée. Les syndicats, eux, maintiennent leurs revendications. À tel point qu'aujourd'hui, "la survie d'Air France est en jeu", selon le ministre de l'Économie Bruno Le Maire. "Le risque, c'est qu'Air France devienne une compagnie aérienne de deuxième catégorie", nuance l'économiste Nicolas Bouzou, sur Europe 1. Pour lui, l'État est en grande partie responsable de ce crash.
La direction, les syndicats et l'État sont "fautifs". Nicolas Bouzou connait bien l'entreprise, pour y avoir réalisé une mission en 2015. À l'heure de désigner les "fautifs", le directeur du cabinet de conseil Asterès n'épargne personne. Ni la direction, "incapable de proposer elle-même de véritables projets à Air France", ni les syndicats, "et plus particulièrement les syndicats de pilotes". Et surtout pas l'État, "qui a été un très mauvais actionnaire et qui finalement n'a jamais été capable de faire en sorte qu'Air France mène un vrai projet entrepreneurial".
"Sans faire insulte aux dirigeants d'Air France, on a toujours nommé à sa tête des hauts fonctionnaires", observe l'économiste dans Europe Soir. Alexandre de Juniac, président entre 2011 et 2016, était ainsi directeur du cabinet de Christine Lagarde, alors ministre de l'Économie, de l'Industrie et de l'Emploi, de 2009 à 2011. Et Jean-Marc Janaillac est un proche de l'ancien président Hollande. "Ça dit quelque chose d'intéressant : que l'État a toujours considéré Air France comme une sorte d'administration", poursuit Nicolas Bouzou.
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"L'État ferait une excellente opération" en se retirant du capital. Dimanche, le gouvernement a durci le ton : non, l'État ne viendra pas à la rescousse de la compagnie. Pour Nicolas Bouzou, il ferait même mieux de se débarrasser des 14% qu'il détient encore dans le capital d'Air France-KLM. "L'État ferait une excellente opération, pas financière, parce que l'entreprise ne vaut pas grand-chose, mais pédagogique et politique. Car cette présence donne le sentiment au personnel d'Air France que cette société, au fond, est absolument insubmersible et qu'en dernier recours, l'État, c'est-à-dire nous, les contribuables, viendront sauver l'entreprise. C'est extrêmement malsain", considère l'économiste, qui conclut : "En plus, Air France n'est pas une entreprise de service public, on l'a bien vu ces derniers jours." Mardi, lors de la quinzième journée de grève, la compagnie prévoit d'assurer 80% de ses vols.