Déficit : des économistes appellent le gouvernement à mêler baisse des dépenses et mesures fiscales

© Riccardo Milani / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP
  • Copié
avec AFP / Crédits photo : Riccardo Milani / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP
Le Conseil d'analyse économique (CAE) suggère de miser à la fois sur la baisse des dépenses et sur "des hausses temporaires de taxes" dans le but de baisser le déficit de la France, sans étouffer la croissance du pays.

Comment faire baisser le déficit public de la France sans étouffer la croissance ? Le Conseil d'analyse économique (CAE) suggère mercredi de miser à la fois sur la baisse des dépenses et sur "des hausses temporaires de taxes". Dans une note d'une dizaine de pages, l'organisme placé auprès du Premier ministre martèle que "pour garantir la soutenabilité de la dette, continuer à se financer à des taux d'intérêt bas et respecter ses engagements européens, la France doit réduire son déficit public", mesuré à 5,5% du PIB en 2023.

Mais elle doit aussi "éviter une consolidation trop rapide" des finances publiques, "pour protéger la croissance et éviter une hausse du chômage", avertissent Adrien Auclert, Thomas Philippon et Xavier Ragot, les trois économistes ayant rédigé la note.

Un assainissement "modéré mais soutenu" des finances publiques

En avril, l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) avait estimé que les 10 milliards d'économies actés pour 2024 - auxquels l'exécutif sortant veut ajouter 15 milliards d'économies - amputeraient la croissance française de 0,2 point de PIB. Les 20 milliards d'euros de coupes dans les dépenses prévues en 2025, qui pourraient ralentir la consommation et l'investissement, réduiraient à leur tour la croissance nationale de 0,6 point de PIB selon l'OFCE.

Le CAE propose donc mercredi un assainissement "modéré mais soutenu" des finances publiques, de façon à ce que la France soit en mesure "à moyen terme" (d'ici 7 à 12 ans) de dégager chaque année un excédent de l'ordre de 1 point de PIB.

Un tel excédent permettrait "de placer la dette publique sur une trajectoire durablement décroissante" pour autant qu'il n'y ait pas de nouvelles "crises" économiques. En cas de "gros choc" sur l'activité, un excédent proche de 1% permettrait plus modestement "d'assurer la stabilité de la dette publique à long terme". En 2023, la France était encore loin du but avec un déficit primaire (hors charges d'intérêt de la dette) de 3,2% du PIB selon Bercy.

Les économies décidées par le gouvernement pas encore "à la hauteur de l'enjeu"

Le mouvement d'économies sur les dépenses publiques initié par le gouvernement depuis plus d'un an va dans le bon sens, mais "son rendement n'est pas à la hauteur de l'enjeu", juge le CAE. Pour trouver les "112 milliards d'euros" qui permettraient de dégager chaque année des excédents, "des mesures temporaires devraient probablement être également prises, telles que des hausses temporaires de taxes ou une sous-indexation généralisée des dépenses et des tranches d'imposition."

"À titre purement illustratif," si le salaire de base des fonctionnaires, "l'ensemble des prestations sociales en espèces et le barème de l'impôt sur le revenu étaient tous gelés en 2025, plutôt que revalorisés à la hauteur de l'inflation de 2024 (estimée à 2,5%), cela rapporterait environ 20 milliards d'euros aux comptes publics", illustre le CAE.

Parmi les mesures "ayant un impact positif sur les comptes publics", les trois auteurs de la note citent le recentrage des aides à l'apprentissage sur les jeunes les moins qualifiés (4 milliards d'euros d'économies selon l'OFCE), le ciblage des exonérations de cotisations patronales sur les bas salaires (2 milliards) ou la réforme du crédit d'impôt recherche, de façon à le recentrer sur les petites et moyennes entreprises (2,5 milliards d'euros d'économies). Le CAE suggère enfin de supprimer certaines niches fiscales liées aux droits de succession, pour un gain anticipé de 9 milliards d'euros.