L'équation paraissait impossible : financer les nouvelles dépenses en faveur de l'emploi ou de la jeunesse tout en respectant la promesse de réduire le déficit. Mais le gouvernement doit reconnaître désormais qu'il ne pourra plus tenir cette gageure, pourtant répétée par les ministres de Bercy ces derniers mois. En effet, il apparaît que les dépenses de l'Etat vont augmenter de près de 7 milliards d'euros l'an prochain par rapport aux objectifs annoncés.
Dépenses supplémentaires. Après n'avoir pas respecté ses engagements budgétaires plusieurs années de suite, le gouvernement avait promis à Bruxelles un plan de 50 milliards d'euros d'économies sur trois ans. Mais à Bercy on a été obligé de se rendre à l'évidence ; il y a eu trop de cadeaux ces dernières semaines. On peut notamment citer le dégel du point d'indice pour les fonctionnaires, les mesures pour l'emploi, les aides aux agriculteurs, la revalorisation du salaire des enseignants ou encore le coup de pouce budgétaire aux régions. Après ces annonces, il n’est plus question de serrer la vis, puisqu'il va falloir au contraire donner un peu plus d'argent que prévu aux ministères concernés.
Comment compenser ces nouvelles dépenses ? Bercy assure, malgré toutes ces dépenses supplémentaires, que le déficit sera bien comme prévu réduit à 2,7% en 2017. Mais ce ne sera pas grâce à de nouvelles économies. Ainsi, certaines grosses dépenses liées au crédit d'impôt pour les entreprises ne seront pas prises en compte l'an prochain, mais en 2018. Le gouvernement sauve la face, mais renvoie à plus tard les difficultés puisqu'il faudra bien comptabiliser à un moment ou un autre les 4,2 milliards d'euros ainsi reportés.
Le ministère espère aussi récupérer 1,4 milliard d'euros supplémentaire grâce à la lutte contre la fraude fiscale, qui devrait rapporter l'an prochain près de 12 milliards à l'Etat, et compte également profiter des taux d'intérêt historiquement bas pour réduire le coût de la dette française. C'est donc grâce au contexte, et non grâce à des mesures structurelles, que l'Etat compte tenir son budget.
"La France, c'est la France..." Une attitude qui ne devrait pas manquer d’exaspérer la Commission européenne. Jean-Claude Junker, son président, le soupire souvent : "la France, c'est la France..." En clair, les institutions européennes sont habituées aux écarts financiers de Paris. Pour autant, Bruxelles craint les effets de ce que l'on appelle déjà "un budget électoral", et qui doit encore s’alourdir. En effet, la possible baisse d'impôt de 2 milliards d'euros promise par François Hollande n’a pas encore été prise en compte. Pendant ce temps, la dette de l'Etat ne cesse de se creuser, même si Bercy répond que c'est à un rythme moins rapide qu'auparavant.