Le changement intervient dans un contexte bien compliqué. Alors que la SNCF connaît ces dernières semaines d'importantes perturbations, une grève sauvage dans le centre de maintenance des TGV Atlantique ayant succédé à des arrêts de travail après l'accident d'un TER dans les Ardennes, l'entreprise va connaître l'arrivée d'un nouveau patron. Vendredi, Guillaume Pepy doit en effet céder sa place à Jean-Pierre Farandou, après plus de onze ans passés à la tête de l'entreprise ferroviaire. Le nouveau dirigeant, qui a vu sa préparation chamboulée par les récents événements, pourra s'appuyer sur sa très bonne connaissance de la SNCF.
Alors que son arrivée était prévue depuis plusieurs semaines, la préparation de Jean-Pierre Farandou a évidemment été perturbée par le contexte actuel. Le dirigeant avait monté une petite équipe avec qui il a fait campagne et qui l'a aidé à préparer les auditions devant les parlementaires. Avec cette équipe, dans laquelle on trouve un ancien directeur de la communication de la SNCF et un des dirigeants actuels de la compagnie, Laurent Trévisani, il s'est imprégné de tous les sujets depuis son bureau de patron de Keolis. Mais cette formation studieuse s'est accélérée le week-end du 19-20 octobre quand la SNCF a été bloquée après l'accident dans les Ardennes. Jean-Pierre Farandou a alors été intégré à toutes les réunions de crise, ce qui a totalement chamboulé la fin de sa préparation, reconnait son entourage.
"Il n'a pas d'état de grâce"
Une fois officiellement à la tête de la SNCF, la première tâche de Jean-Pierre Farandou sera notamment de rassurer les employés de la SNCF, assure Gilles Dansart, spécialiste de l'entreprise ferroviaire. "Il doit les convaincre qu'il est de bonne foi, qu'il a un vrai projet, que ce n'est ni un serviteur servile du gouvernement, ni un Pepy bis", explique-t-il au micro d'Europe 1. "Il n'a pas beaucoup de temps, pas d'état de grâce pour essayer d'obtenir de leur part une sorte de pause, le temps qu'il mette sur la table des actes, des mots, peut-être lâcher du lest pour éviter que la SNCF plonge dans une grave crise sociale. Il n'a pas beaucoup de temps et il le fait sous pression".
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Si Jean-Pierre Farandou n'a pas encore lancé d'invitation, les syndicats s'attendent à être très vite reçus. Au-delà du climat social, la volonté du nouveau dirigeant est de réussir la nouvelle SNCF. Au 1er janvier, la réforme ferroviaire doit entrer en vigueur avec la fin d'un totem : le recrutement au statut. Jusqu'ici, Jean-Pierre Farandou a surtout fait entendre qu'il voulait faire différemment de son prédécesseur, en arrêtant notamment de créer à tout va des filiales. Il veut que tout le monde travaille à nouveau ensemble, et souhaite se concentrer moins sur le marketing que sur les trains de tous les jours.
Toute une carrière au sein de la SNCF
Pour mener à bien ses projets, Jean-Pierre Farandou pourra compter sur sa très bonne connaissance de l'entreprise, lui qui a fait toute sa carrière au sein de l'entreprise, au point, qu'en interne, on dit qu'il a fait "cheminot 1ère langue". Il a commencé comme chef de gare à Rodez en 1981, puis a entre autres dirigé Thalys. Il a aussi travaillé à la direction des ressources humaines, et depuis 2012, il dirige Keolis, la filiale de transport urbain de la SNCF. Ce mandat lui a permis de tisser un excellent réseau avec les élus locaux.
Pourtant, le nouveau patron de la SNCF n'aurait pas dû être lui. À 62 ans, il ne correspond pas au portrait-robot des chasseurs de têtes mandatés pour trouver la perle rare. Et de son côté, l'exécutif voulait un dirigeant jeune venant de l'extérieur pour faire au moins deux mandats. Mais le poste a connu de nombreux refus, au prétexte, notamment, qu'il n'était pas assez payé (450.000 euros par an). Si la somme est énorme, elle ne l'est pas pour un grand patron qui se doit de gérer 250.000 personnes en plus d'être sur le pont 24 heures sur 24. "C'est un job prestigieux, mais un job avec beaucoup d'emmerdes", résume pour Europe 1 un bon connaisseur de l'entreprise.