1:23
  • Copié
Barthélémy Philippe / Crédits photo : SARAH MEYSSONNIER / POOL / AFP , modifié à
Le Premier ministre tiendra son discours devant l’Assemblée nationale ce mardi à 15 heures. Michel Barnier devra apporter des réponses sur le budget alors que le déficit et la dette française poursuivent leur course. L’ancien négociateur du Brexit va particulièrement cibler les grandes entreprises et épargner les dépenses publiques.

C'est le grand jour pour Michel Barnier. Ce mardi après-midi, le Premier ministre va prononcer sa déclaration de politique générale face à l’Assemblée nationale, avant de se prêter au même exercice au Sénat. Alors que les finances publiques sont dans le rouge, l’ancien négociateur du Brexit devrait consacrer une partie importante de son discours au budget, qui sera présenté le 9 octobre à l’Assemblée. Pour tenter de limiter la course folle du déficit et de la dette, le locataire de Matignon devrait annoncer la baisse de certaines dépenses publiques et des augmentations d’impôts pour les particuliers les plus fortunés. Mais la cible principale du plan fiscal de Michel Barnier, ce sont les grandes entreprises.

Une augmentation exceptionnelle de l’impôt sur les sociétés

Ainsi, les multinationales vont être mises à contribution pour corriger la trajectoire du déficit public, qui pourrait dépasser 6% fin 2024. 300 grands groupes dont le chiffre d'affaires égal ou dépasse un milliard d’euros vont subir une augmentation exceptionnelle de l’impôt sur les sociétés, dont le taux sera rehaussé de 25% à 33,5%, son niveau d’avant 2017, pendant une durée d’un an. 

Avec cette augmentation de 8,5 points, Bercy envisage de récupérer huit milliards d’euros. Par ailleurs, l'impôt sur les rentes des énergéticiens va être reconduit et renforcé (CRIM), avec trois milliards d'euros de recettes à la clef. La taxe sur les rachats d’action, qu’Emmanuel Macron envisage de mettre en place depuis 2022, va également enfin voir le jour. 

Même s’il épargne les petites et moyennes entreprises, cet alourdissement de la fiscalité est totalement indigeste, selon l’économiste Marc Touati : "Augmenter les impôts alors que la France est numéro un mondial, ce n’est pas acceptable. Comme nous sommes sur un sommet historique, la moindre augmentation va casser l’activité économique. Mécaniquement, les entreprises vont faire moins de profit. Sur l’impôt sur les sociétés, ponctionner, d’accord, mais s’il n’y a pas de profits, il n’y aura pas de rentrées fiscales", s’agace-t-il.

Un manque d’ambition concernant la réduction des dépenses publiques

C’est l’équation évoquée par Michel Barnier pour soulager des finances publiques à la dérive. Un gros effort sur les dépenses publiques. Et des augmentations ponctuelles et ciblées sur les particuliers et les grandes entreprises. Sauf qu’à ce stade, la colonne "réduction des dépenses publiques" est assez peu remplie. 

Seule une diminution des aides à l'apprentissage ainsi qu'un coup de rabot sur le crédit impôt recherche, le Pacte Dutreil, qui facilite la transmission d'entreprises familiales, et la fiscalité des locations meublées type Airbnb sont évoquées. Mais aucune révolution à l’horizon, comme le fait observer Eric Dor, directeur des études économiques à l’IESEG. "Le malaise, c’est qu’on a l’impression de procéder encore à un alourdissement de la fiscalité dans l’espoir d’échapper à un effort sur les dépenses publiques. On ne peut pas retarder éternellement une discussion approfondie sur ce sujet. C’est indispensable même si c’est impopulaire, même si ça heurte des intérêts catégoriels".

Et pourtant, c’est bien le levier le plus efficace pour résorber la dette et le déficit. Selon Eric Dor, "il faut absolument planifier une réduction de l’emploi public en ne remplaçant qu’une partie des départs en retraite ou en augmentant la mobilité des fonctionnaires grâce aux nouvelles technologies. C’est là-dessus qu’on aimerait voir au moins l’ébauche d’une politique. C’est aussi une nécessité pour améliorer le statut des fonctionnaires. Dans tous les pays où l’emploi public est pléthorique, les fonctionnaires sont relativement mal payés."

Problème, Michel Barnier n’a jamais évoqué la moindre velléité en ce sens. Et pendant le premier quinquennat d’Emmanuel Macron, la fonction publique a augmenté de près de 200.000 agents, ce qui porte l’effectif total des fonctionnaires à 5,7 millions.