"L'outil militaire et industriel doit être en mesure de faire face à toute menace sur la paix et la stabilité. Ce n'est pas vraiment le cas aujourd'hui", s'est alarmé le sénateur Les Républicains Pascal Allizard, auteur de cette proposition de loi, adoptée à 244 voix contre 34 mardi.
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Près de 60% des fonds du Livret A et du LDSS sont dédiés au logement social
Après plusieurs tentatives infructueuses au Parlement, le Sénat souhaite donc flécher une partie de l'épargne du Livret A (plafonné à 22.950 euros) vers l'industrie de la défense, touchée par des difficultés de financement renforcées par la guerre en Ukraine. Le texte propose de flécher une partie des encours du Livret A et du Livret de développement durable et solidaire (LDDS) vers le financement des entreprises de l'industrie de défense française.
Aujourd'hui, près de 60% des fonds du Livret A et du LDSS sont dédiés au logement social. Le reste, les encours non centralisés, mobilisés aujourd'hui pour financer les PME (à hauteur d'au moins 80%), les projets de transition énergétique (10%) et l'économie sociale et solidaire (5%) sont précisément visés par le texte.
Un dispositif similaire avait déjà été adopté au Parlement ces derniers mois, mais le Conseil constitutionnel l'avait censuré par deux fois, le jugeant sans rapport avec les textes auxquels il avait été ajouté.
"Une solution efficace" ou le financement "des marchands de canons" ?
Pourquoi ce texte fait-il polémique ? Les différents partis politiques ne semblent s'accorder sur le sujet. Les groupes Républicains, centriste, le Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants (RPDI), Les Indépendants ainsi que le Rassemblement Démocratique et Social Européen (RDSE) ont voté pour, avec comme argument "la solution efficace à court terme". "C'est une solution efficace à court terme pour accélérer le passage à une véritable économie de guerre", a plaidé Vanina Paoli-Gagin (groupe Les Indépendants, de centre-droit).
À l'inverse, les groupes communistes et écologistes ont voté contre, haussant même le ton. "Vous voulez financer les marchands de canons en prenant dans le livret avec lequel les Français pensaient financer le logement ou le développement durable", s'est inquiété l'écologiste Thomas Dossus. Le parti socialiste s'est lui abstenu.
Un produit dédié à l'industrie de la défense ?
Pour la droite sénatoriale, ce texte doit aboutir mais selon la ministre déléguée chargée des Entreprises, du Tourisme et de la Consommation, Olivia Grégoire, le Livret A n'est pas "l'instrument le plus approprié".
Le sénateur socialiste Rachid Temal a lui défendu une autre vision : celle d'un produit dédié - le "Livret d'épargne défense souveraineté" -, synonyme selon lui de plus de "clarté et transparence". Mais le Sénat l'a rejeté.