Les agriculteurs poursuivent lundi leur mouvement de blocage, entamé la veille au soir, de plusieurs raffineries et dépôts de carburant pour protester contre la concurrence de l'huile de palme importée sur le marché des biocarburants. Le premier syndicat agricole, la FNSEA, et les Jeunes Agriculteurs (JA) ont appelé leurs adhérents à occuper au total 14 sites stratégiques durant trois jours reconductibles.
Les principales informations à retenir :
- Les agriculteurs ont débloqué la raffinerie de La Mède, dans les Bouches-du-Rhône
- Les agriculteurs poursuivent un mouvement de blocage de trois jours reconductibles débuté dimanche soir
- Ils bloquent en tout 14 sites stratégiques : des raffineries et des dépôts de carburants mais il n'existe pas de risque immédiat de pénurie de carburants
- Les agriculteurs reprochent au gouvernement d'avoir autorisé Total à importer de l'huile de palme, un produit controversé car accusé de favoriser la déforestation en Asie du Sud-Est
La bioraffinerie de La Mède comme symbole. Jusqu'à 300.000 tonnes par an d'huile de palme, produit hautement controversé car accusé de favoriser la déforestation en Asie du Sud-Est, doivent être importées pour alimenter la bioraffinerie Total de La Mède dans les Bouches-du-Rhône, qui doit démarrer cet été. Alors que l'agriculture française peut fournir davantage d'huile de tournesol ou de colza, mais plus chère.
L'accès à ce site symbolique était bloqué depuis dimanche soir par plusieurs dizaines d'agriculteurs, rassemblés dans le calme. Le barrage a été levé à la mi-journée lundi. "Nous n'avons pas obtenu ce que nous voulions, on ne se sent pas aidés, mais les agriculteurs sont fatigués et sont obligés de retourner travailler", a déclaré à l'AFP Jean-Paul Comte.
Un blocage à Nantes. "C'est un coup de semonce que nous voulons donner aujourd'hui", a déclaré lundi Christiane Lambert, présidente de la FNSEA, devant la raffinerie de Donges, près de Nantes. Empêchés de bloquer la raffinerie Total, Plusieurs dizaines d'agriculteurs venus des Pays de la Loire ont alors mené une opération escargot sur la voie express Nantes-Saint-Nazaire avec leurs tracteurs, occasionnant plusieurs kilomètres de bouchons. Finalement autorisé à accéder à la raffinerie, les agriculteurs ont alors commencé à déverser le contenu de leurs bennes, remplies de pneus et de déchets, devant l'entrée sud.
Blocages en série. Depuis dimanche soir, les raffineries Total de Feyzin près de Lyon, de Gonfreville-l'Orcher près du Havre et de Grandpuits en Seine-et-Marne sont bloqués par des agriculteurs comme les dépôts pétroliers du port rhodanien Edouard Herriot, du port du Rhin, ainsi que ceux de Vatry dans la Marne, de Lespinasse près de Toulouse et de Cournon dans le Puy-de-Dôme. Ils ont étendu le mouvement lundi matin en bloquant l'accès aux dépôts de Grigny dans l'Essonne, Coignières dans les Yvelines, une autre raffinerie Total à Donges en Loire-Atlantique, mais aussi le dépôt de Gennevilliers dans les Hauts-de-Seine, comme l'a constaté l'envoyée spéciale d'Europe 1.
Une centaine d'agriculteurs mobilisés à Dunkerque. Dans le Nord, une centaine d'agriculteurs bloquent depuis lundi 4 heures du matin le dépôt de carburant de Dunkerque. Ils se sont répartis entre les différents points d'accès du site, selon l'envoyé spécial d'Europe 1 sur place. Après avoir un temps été bloqués par la police, ils ont pu s'installer et sont désormais bien décidés à rester sur place pendant trois jours. Ils ont mis en place un roulement des équipes pour assurer une présence 24 heures sur 24. Ils ont tout prévu pour ne manquer de rien : chapiteau, groupe électrogène et même une friteuse pour les repas.
Un barrage filtrant à Gennevilliers. Dans les Hauts-de-Seine, les agriculteurs sont mobilisés au dépôt de carburant de Gennevilliers. Paille, gravats, terre... ont été déversés à l'entrée du site, rapporte l'envoyée spéciale d'Europe 1. Une séance de tractage a été organisée, une initiative plutôt bien accueillie par les automobilistes.
Les syndicats reçus mardi. Sébastien Lecornu, le secrétaire d’État auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire, invité sur Europe 1 lundi matin a rappelé que le contrat passé avec Total était " un héritage du gouvernement précédent qu'on ne renie pas car il s'agissait de sauver des emplois". "Nous avons imposé une part d'huile recyclée", a aussi précisé Sébastien Lecornu.
"Ces blocages sont illégaux", a pour sa part déclaré le ministre de l'Agriculture, Stéphane Travert, estimant que "ce n'est pas en bloquant" des raffineries "qu'on trouvera des solutions". Il s'est néanmoins engagé à recevoir mardi les représentants de la FNSEA et ceux des Jeunes Agriculteurs (JA), syndicats qui ont appelé aux blocages pour trois jours reconductibles.
Pas de pénurie de carburant à craindre. Une pénurie de carburant n'est pas à craindre dans l'immédiat, la France comptant au total sept raffineries en activité ainsi que 200 dépôts de carburant. De plus, l'Etat dispose de stocks stratégiques pour trois mois.
Faire modifier la loi Alimentation. Le mouvement des agriculteurs est observé avec intérêt par les ONG environnementales, d'ordinaire opposées à la FNSEA dans les dossiers phytosanitaires. Les paysans espèrent aussi le soutien des consommateurs, en dénonçant les effets sur le contenu des assiettes d'accords commerciaux internationaux, comme le CETA signé avec le Canada et l'accord UE-Mercosur en cours de négociation.
Les agriculteurs demandent la réintroduction dans la loi Alimentation, examinée à partir du 26 juin au Sénat, d'un amendement sur l'interdiction d'importer toute denrée produite en utilisant des substances phytosanitaires interdites dans l'Union européenne. Ils souhaitent aussi que le gouvernement renonce à son contingent d'importation d'huile de palme, et réclament un allègement du coût du travail salarié de saisonniers.