Une offensive dans trois nouvelles villes françaises, au risque de rallumer la polémique. Voilà ce qu'a osé l'Américain Uber lundi en déployant son service UberPop à Marseille, Nantes et Strasbourg. Alors que le conflit s'était apaisé avec les taxis et les autres VTC après une décision du Conseil constitutionnel en mai dernier, cette décision va relancer le débat autour de cette application litigieuse. Europe 1 fait le point afin d'y voir plus clair sur la situation d'Uber sur le marché hexagonal.
Uber, un service de VTC parmi d'autres. Uber est à l'origine une entreprise née en 2009 dans la Silicon Valley, en Californie. Installée en France en 2011, elle y fait aujourd'hui rouler 4.000 chauffeurs, ce qui représente son troisième marché derrière les États-Unis et le Royaume-Uni. Uber propose des VTC, c'est-à-dire des voitures de transport avec chauffeur, comme le font d'autres entreprises en France, Allocab et Chauffeur-Privé par exemple.
Les chauffeurs d'Uber, des professionnels présents dans quatre villes. Le principe des VTC ? Les chauffeurs qui vous conduisent n'ont pas acheté de licence, contrairement aux chauffeurs de taxis, d'où le reproche qui leur est fait de pratiquer une concurrence déloyale.
Les conducteurs de VTC ne sont pourtant pas exempts d'obligations. Ils doivent - s'inscrire sur le registre national des professionnels du VTC, une procédure qui coûte 170 euros et - créer leur propre société ou - devenir auto-entrepreneur. Aujourd'hui, Uber fait rouler ses VTC dans quatre villes de France : Paris, Lyon, Lille et Nice où la société revendique un million de clients réguliers.
Les VTC d'Uber, dans les clous de la loi. Si le conflit avec les taxis a longtemps duré et a connu de multiples rebondissements, il a connu un premier épilogue avec la loi Thévenoud adoptée en octobre 2014, censée instaurer la paix. Les bisbilles avaient continué jusqu'en mai dernier. Le Conseil constitutionnel a clarifié la situation sur trois points : les VTC pourront tarifer au kilomètres, ils ont l'interdiction de marauder en se faisant localiser, ils doivent se garer entre deux courses. Le camp des taxis aussi bien que celui des VTC s'étaient dit satisfaits de ces décisions.
UberPop, le "covoiturage" version Uber. Mais la hache de guerre n'est pas pour autant enterrée. En lançant en février 2014 son service UberPop, la société américaine a attisé la fureur des taxis mais aussi des autres VTC. Avec environ 1.000 chauffeurs exerçant désormais dans neuf villes dont Marseille, Strasbourg et Nantes depuis lundi, l'application met en relation les clients avec des particuliers désireux d'arrondir leur fins de mois en faisant le chauffeur. Inutile d'être inscrit sur le registre des VTC, il suffit d'avoir 21 ans, d'avoir le permis et un casier judiciaire vierge. Le service propose juste du "covoiturage", avançait alors Uber qui revendique, par ailleurs, 400.000 clients fidèles à cette application.
La justice française a dit "non" en octobre 2014. Si la loi française a réglementé les VTC, elle semble pour le moment allergique au dernier petit d'Uber. En octobre 2014, le tribunal correctionnel de Paris a dénié à UberPop la qualité de "covoiturage", condamnant la société californienne à 100.000 euros d'amende. Son tort ? Les chauffeurs travaillant dans le cadre de l'application avancent aux clients une tarification en lien avec les kilomètres parcourus et au temps écoulé. Ce n'est donc pas un partage de frais avec le client mais plutôt le paiement d'une course. Mais Uber, qui a pour objectif de faire plier la loi française à ses pratiques, fait appel, suspendant pour le moment la condamnation. Elle sera fixée en octobre sur cette procédure. La société californienne a en plus lancé une contre-offensive en soumettant des QPC (questions prioritaires de constitutionnalité) au sujet de son application.
Un décret interdit UberPop le 1er janvier mais... Devant la pression des taxis qui ont multiplié en décembre les opérations escargots, le gouvernement a publié un décret interdisant UberPop à compter du 1er janvier 2015. Ses chauffeurs sont donc hors-la-loi mais tant que la justice n'aura pas condamné officiellement UberPop, l'entreprise américaine peut prospérer. Elle prélève environ 25% de chacune des courses effectuées par ses affiliés. Pour le moment, seuls les chauffeurs UberPop prennent des risques. En cas de contrôle policier, ils peuvent se voir saisir leur véhicule, infliger 15.000 euros d'amende pour "travail dissimulé" et "exercice illégal d'une profession réglementée" et suspendre leur permis pendant cinq ans.
Certains pouvoirs locaux comme les préfectures du Nord et de la Gironde ont aussi pris des arrêtés contre UberPop. Ce qui n'empêche pas les tensions d'apparaître. À Bordeaux, fin avril, une rixe a eu lieu entre deux taxis et un chauffeur d'UberPop.