Prud'hommes : vers un plafonnement des indemnités

Prud'hommes
Aujourd'hui, lorsqu'un chef d'entreprise est attaqué aux prud'hommes, il ne sait pas combien de temps cela va durer, ni combien ca va lui coûter. © MYCHELE DANIAU / AFP
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Anne-Laure Jumet avec G.S.
Manuel Valls prépare des pistes pour lever les freins à l'embauche dans les petites entreprises. 

Comment lever les freins liés à l'emploi dans les TPE et les PME ? Manuel Valls consulte lundi et mardi les partenaires sociaux, pour préparer des annonces attendues le 9 juin. La piste d'un contrat de travail spécifique pour les petites entreprises semble être enterrée par le Premier ministre. En revanche, on se dirige vers un autre outil : le plafonnement des  indemnités que doivent verser les entreprises en cas de condamnation aux prud'hommes.

Jusqu'à l'équivalent de deux ans de salaire. L'exécutif part d'un principe désormais acté : l'un des plus grands freins à l'emploi, c'est l'incertitude. Aujourd'hui, lorsqu'un chef d'entreprise est attaqué aux prud'hommes, il ne sait pas combien de temps la procédure va durer, ni combien elle va lui coûter. Or la facture peut s'envoler en cas de licenciement abusif. En pratique, c'est souvent proportionnel à l'ancienneté. Un salarié avec 20 ans d'ancienneté, par exemple, recevra l'équivalent d'une indemnité de près de deux ans de salaire. Une menace qui freine parfois les éventuels envies d'embauche du patronnât.

"Je regarde à deux fois avant d'embaucher". L'idée du gouvernement est donc de plafonner ces indemnités. Cela permettrait à l'employeur de savoir quel risque il prend en cas d'embauche, de connaître plus précisément le coût de la rupture du contrat de travail. Interrogé par Europe 1,  Jean-Michel Pottier, président d’Ariane 7, une entreprise de textile publicitaire de 15 salariés, près de Valenciennes, a par exemple été condamné à verser 60.000 euros à une salariée qu’il avait licenciée pour faute grave.

"On rentre dans une sphère infernale. J'ai sorti de ma poche des économies pour faire une augmentation de capital. Je ne me suis pas payé pendant six mois. Evidemment, maintenant, je regarde à deux fois avant d'embaucher en CDI", assure le chef d'entreprise.

"Une inversion des valeurs de la République"! Les défenseurs des salariés, en revanche, ne voient pas cette mesure du même œil. Instaurer un barème, cela veut dire instaurer un prix fixe pour le licenciement. Et cela prive donc le salarié d'un important moyen de pression en cas de rapport de forces  avec son employeur. "Quand l'employeur est en fraude, il est en fraude, il doit être sanctionné", estime ainsi le socialiste Gérard Filoche, ex-inspecteur du Travail et spécialiste du droit social. "On ne peut pas régler ça comme du papier à musique. C'est une complète inversion des valeurs qui ont été bâties dans notre République depuis plus d'un siècle", renchérit-il.

La mesure n'est pas encore complètement arbitrée. Le gouvernement doit encore définir le plafond de cette indemnité et la cible visée : doit-on accorder la mesure à toutes les entreprises ou seulement aux plus petites ?