Le gouvernement a-t-il résolu son dilemme budgétaire ? Désireux de redonner du pouvoir d'achat aux salariés en supprimant les cotisations salariales, l'exécutif a vu sa marge de manœuvre restreinte à cause des dérapages budgétaires du précédent gouvernement. Pour tenir la promesse de campagne de Macron, Bercy aurait mis au point une stratégie, selon Les Échos : appliquer la hausse de 1,7 point de la CSG dès le 1er janvier puis réaliser en deux temps la suppression des cotisations salariales.
Nécessaires économies. Objectif de ce décalage : réaliser de précieuses économies. En effet, en augmentant la CSG dès janvier mais en attendant quelques mois pour supprimer définitivement toutes les cotisations salariales, le gouvernement s'accorde quelques mois de moindres dépenses. "Le principe est acté, il reste à déterminer les modalités exactes", assure une source gouvernementale au quotidien économique.
Transfert du financement de la protection sociale. Durant sa campagne, Emmanuel Macron avait promis de redonner du pouvoir d'achat aux salariés en supprimant les cotisations, le financement de la protection sociale étant assuré à l'avenir par l'augmentation de la CSG de 1,7 point (le taux doit passer de 7,5% à 9,2%). Financièrement, ça ne change rien pour l'État mais l'effet est censé être positif pour les salariés, seuls gagnants de la suppression des cotisations chômage et maladie et qui partageront à l'avenir la hausse de la CSG avec les retraités et les bénéficiaires des revenus du capital.
"Remplir l'engagement du président". Le gouvernement va néanmoins devoir faire avaler la pilule aux principaux intéressés. En effet, le décalage implique que le gain de pouvoir d'achat ne sera pas aussi important que prévu au début de l'année. Le gouvernement maintient toutefois que "dès le 1er janvier, il y aura un gain de pouvoir d'achat pour les salariés". Il compte faire en sorte que la première étape de la suppression des cotisations compense la hausse de la CSG et accorder le reste plus tard dans l'année. A terme, un salarié payé au Smic devrait gagner 250 euros de plus par an.
"Au final, la totalité de la réforme sera bien réalisée d'ici la fin 2018, si bien que le gouvernement remplira pleinement l'engagement pris par le président de la République", souligne la source gouvernementale. Il faudra quand même faire preuve de pédagogie pour convaincre les Français.
"Une arnaque à tous les étages". Invité d'Europe 1 mercredi, le député de la France insoumise Éric Coquerel a vivement réagi à la stratégie du gouvernement. "Ça confirme que ce bidouillage est une arnaque à tous étages. On va prendre d'abord aux Français, avant soi-disant de leur rendre du pouvoir d'achat". Il a fustigé la fiscalité à deux vitesses instaurée par l'exécutif : "On dans un contexte de réforme profonde de la fiscalité avec la quasi-suppression de l'ISF et un plafond de taxation des revenus du capital. Donc, en réalité ça va continuer à avantager les revenus des plus riches alors que la CSG est un impôt fixe qui touche tout le monde".
Egalement interrogé par Europe 1, Olivier Faure patron du groupe Nouvelle gauche (PS) à l'Assemblée nationale, abondait dans le même sens, dénonçant une mesure inégalitaire : "En faisant en sorte que les choses se passent en deux ans, un salarié au Smic va perdre de l'argent, à peu près 30 euros l'année prochaine. Et ce n'est que l'année suivante qu'il sera compensé. Mais si vous êtes retraité, vous ne serez pas compensé, et donc vous aurez une baisse du pouvoir d'achat. Dans le même temps, vous avez un cadeau fiscal de trois milliards pour les plus fortunés, via les actionnaires qui n'auront plus à payer l'impôt sur la fortune", analyse-t-il.
"Je cherche la logique d'un gouvernement qui, sous couvert d'un nouveau monde, est en réalité en train de nous faire basculer dans un monde très ancien, celui dans lequel la rente et les privilège étaient mieux rémunérés que le travail", conclut le député de la Seine-et-Marne.