Emblème du shopping à Paris, les Galeries Lafayette ont ouvert pour la première fois dimanche 8 janvier. Ouverture rendue possible grâce à la négociation entre la direction et les syndicats d'un accord d'entreprise, comme stipulé par la loi Macron, promulguée en août 2015. Les syndicats majoritaires ont approuvé le travail le dimanche en échange de contreparties sur la rémunération et le repos compensateur. Un an et demi plus tard, Europe 1 fait le point sur les magasins qui ont trouvé un accord et ceux où les négociations n'ont pas encore abouti.
C'est signé
Darty et Zara, les pionniers. Une soixantaine d'accords environ ont été conclus pour le travail le dimanche dans les zones touristiques internationales (ZTI) - il y en a désormais 21 dont 12 rien qu'à Paris. Résultat, 15% des commerces situés ont ouvert au moins un dimanche à Paris en 2016. Darty est l'une des premières enseignes à avoir ouvert ses magasins un septième jour, dès octobre 2015. 50 CDI ont été créés pour faire fonctionner les magasins parisiens concernés. L'enseigne d'électroménager a été rapidement imitée par Zara. Le géant espagnol de l'habillement ouvre les portes de ses boutiques depuis début 2016 en contrepartie d'une majoration de salaire de 110% et d'un jour de récupération. Sephora, à l'origine du débat sur le travail de nuit et le dimanche, a trouvé un accord avec les syndicats en mars dernier, avec triplement des salaires à la clé. Même chose chez son concurrent Marionnaud.
Les grands magasins s'y sont mis. Le BHV Marais a été le premier grand magasin parisien à ouvrir le dimanche, en mai 2016. Huit mois plus tard, le succès est au rendez-vous : le dimanche est devenu le deuxième jour de la semaine pour le chiffre d'affaires. L'objectif de hausse de 10% des ventes ayant été atteint, 150 CDI de fin de semaine ont ou vont être créés. Cette décision a eu un effet d'entraînement. Les Galeries Lafayette ont ouvert pour la première fois dimanche grâce à un accord promettant 500 embauches de CDI de 25 heures payées 32 du vendredi au dimanche. La direction table sur une hausse de 5 à 8% du chiffre d'affaires.
Pas évident au Printemps. Face à ce changement, le Printemps Haussmann a été "forcé" de s'aligner sur la concurrence : début janvier, le grand magasin a signé un accord national pour ouvrir le dimanche. Les volontaires seront payés double et bénéficieront d'une aide de 60 euros pour la garde d'enfants. Mais la CGT attaque le Printemps devant l'Inspection du travail pour "travail dissimulé". En cause : les démonstrateurs qui travaillent sur les stands des marques présentes au Printemps et qui ne sont pas couverts par un accord pour le travail le dimanche dans leur entreprise. ici, comme aux Galeries Lafayette, cette question doit être réglée sous peine de voir des stands vides le dimanche.
Le cas des centres commerciaux. Autre réussite, celle du centre commercial de Beaugrenelle, dans le 15ème arrondissement de Paris. Depuis l'ouverture en octobre 2015, le dimanche est devenu le deuxième meilleur jour de la semaine. Pour l'instant, 80% des commerces sont ouverts un septième jour. Les centres commerciaux misent sur un effet boule de neige : plus il y aura de magasins ouverts, plus il y aura de clients, plus les autres magasins seront tentés d'ouvrir à leur tour. Du côté des magasins en général, plusieurs grandes enseignes ont trouvé un accord en 2016, parmi lesquelles Etam, Nature & Découvertes, L'Occitane, le Comptoir des Cotonniers ou encore Apple, chacun avec ses dispositions concernant les majorations de salaire, les jours de récupération et la garde d'enfants. Il est également possible d'acheter des bijoux le dimanche, notamment rue du faubourg Saint-Honoré et place Vendôme, grâce à l'accord signé par l'Union de la joaillerie. Le Bon Marché, symbole du shopping à Paris, ouvrira quant à lui à partir du 19 mars.
C'est en négociation
La Fnac ne devrait plus tarder. La Fnac est un des symboles des négociations sur le travail du dimanche. Le spécialiste de la culture est en négociation depuis plus d'un an et le feuilleton est presque romanesque. En janvier 2016, les syndicats CFDT, CFTC et CFE-CGC avaient validé l'accord proposé par la direction mais celui-ci était bloqué par les syndicats minoritaires. La loi El Khomri, votée en 2016, a changé la donne en accordant plus de pouvoir aux syndicats représentatifs et majoritaires. Depuis, les syndicats en faveur du travail le dimanche sont en position de force. Un accord ne devrait plus tarder, le temps de négocier les dernières modalités. Dans le projet d'accord initial, la direction proposait, pour les magasins ouverts régulièrement, un salaire triplé pour les 12 meilleurs dimanche et doublé les 40 autres. En revanche, aucun repos compensateur n'était accordé.
Bataille dans l'alimentaire. La question se pose dans les supermarchés et hypermarchés d'étendre le travail le dimanche. Actuellement, la loi les autorise déjà à ouvrir jusqu'à 13h mais certaines enseignes en veulent plus. C'est notamment le cas de Monoprix, qui y voit la possibilité de créer des "milliers d'emploi". Mais les négociations n'ont pas avancé depuis un an. Idem chez Carrefour. La CFDT et la CGT s'opposent au travail le dimanche mais sont minoritaires (FO et CGC sont d'accord). Ils veulent plus que la promesse d'embauches dédiées et de salaire majoré de 80% pour les volontaires. Une action de tractation est prévue le 10 janvier dans les magasins de France.
Plusieurs enseignes étrangères ont également du mal à trouver un accord. C'est le cas d'Uniqlo, H&M, C&A, entre autres. Du côté des entreprises françaises qui n'ouvrent toujours pas le dimanche, on peut citer Célio et Petit Bateau.
Un accord de branche ? Enfin, des négociations de branche sont à l'étude, notamment dans l'habillement. Si un tel accord venait à être signé, il n'y aurait plus besoin des accords d'entreprise et tous les professionnels de l'habillement pourraient ouvrir leurs boutiques en ZTI le dimanche, en se passant de la négociation au cas par cas.